Autour d’un "bus diocésain"...


Je, tu, il,... nous, l’Eglise de Cambrai
Le BUS diocésain (27 octobre - 1er novembre 89)

Jean-Marie LAUNAY,
prêtre, responsable du SDV de CAMBRAI

Trente-quatre jeunes de 16 à 28 ans, sept accompagnateurs, un autobus qui visite trente communautés humaines et ecclésiales, cinq jours à la découverte de l’Eglise diocésaine de CAMBRAI...
Une aventure qui ne figurait pas au programme d’une agence de voyages. C’était une initiative du Service des Vocations.

Un certain 8 Juin 1987

Dans la salle des fêtes de LOURDES, les vingt-deux délégués du diocèse de CAMBRAI au congrès national des vocations cherchent des suites à donner à ce temps fort. Comment rendre une Eglise diocésaine soucieuse des vocations et comment permettre à des jeunes de s’éveiller et de répondre à l’appel de Dieu, en prenant conscience de la réalité de la vie d’un diocèse ? Chacun des congressistes venait d’entendre l’expérience du train de la Mission de France, celle des 20 jeunes de CRETEIL qui sont allés à pied pendant la semaine sainte à la découverte de leur diocèse...

"Chez nous ? à Cambrai ? un train ? à pied ? Et si l’on faisait un bus ?". Projet un peu fou, projet retenu et relancé à chaque rencontre du Bureau diocésain du Service des Vocations jusqu’au jour où l’objectif est fixé : ce sera pour la Toussaint 1989. Commence alors la mise en oeuvre.

Deux années laborieuses

UN BUS DIOCESAIN : DANS QUEL BUT ?

Chacun des membres de l’équipe de préparation composée du Bureau S.D.V. (deux prêtres, une laïque, une religieuse) et de deux autres prêtre et religieuse, avait bien quelques idées de lieux à visiter ou communautés à rencontrer mais il s’agissait tout d’abord de définir le but de l’opération avant d’entrer dans les détails d’un programme. Après moult tergiversations parfois difficiles, le bus fut ainsi présenté aux jeunes du diocèse :
"Le Service des Vocations te propose cinq jours de découverte de la vie des hommes et des femmes de chez nous, à la rencontre d’une Eglise vivante, la nôtre, l’Eglise de CAMBRAI ; cinq jours de partages, d’échanges, de prière et de joie pour laisser retentir en toi l’appel du Christ, à vivre de Lui, à prendre ta place dans l’Eglise, comme témoin de l’Evangile,... AUJOURD’HUI ET DEMAIN !"

Deux raisons présidèrent à cet objectif :

  • A l’inverse de la majorité des diocèses de France, celui de CAMBRAI ne correspond pas aux limites administratives d’un département. Le Nord, premier département français avec une population de 2 500 000 habitants est partagé en deux diocèses depuis 1913 : LILLE (1 500 000 habitants) et CAMBRAI qui recouvre les quatre arrondissements du sud du département : VALENCIENNES, DOUAI, MAUBEUGE / AVESNES et CAMBRAI, très marqués par les récessions industrielles (mines, sidérurgie, métallurgie) avec les conséquences de paupérisation que l’on connaît. Les quatre agglomérations précitées sont à la queue de toutes les statistiques économiques françaises. La région étant très tournée vers la métropole lilloise, il est difficile de donner aux chrétiens de Cambrai une conscience diocésaine. La bus permettait alors d’aider les jeunes à cette prise de conscience.
  • Les différents mouvements et aumôneries de jeunes ont souvent signalé l’attrait de nombre d’entre eux pour des lieux de rassemblement tels que TAIZE, LOURDES, PARAY-LE-PONIAL, etc. d’où l’on revient parfois avec nostalgie.
    Tout en ne voulant pas mésestimer l’importance de ces lieux de ressourcement, le bus se voulait être un moyen de visibilisation d’une réelle vitalité de notre diocèse. Il se vit aussi quelque chose de Dieu et de son Eglise chez nous.

Un bus diocésain : qui inviter ?

Ce fut le second et long point d’interrogation de la préparation : fallait-il ouvrir largement à tous las jeunes cette proposition ou la réserver à ceux qui étaient en lien avec le S.D.V. ? De longues discussions aboutirent à cette formulation du tract d’invitation :
"Tous les jeunes de 16 à 30 ans participant ou non aux activités du Service Diocésain des Vocations, désireux de découvrir la vie de notre Eglise peuvent s’inscrire au bus diocésain."

Après un premier tract d’information à Pâques, les bulletins d’inscription furent largement ventilés particulièrement dans les divers groupes du S.D.V. et dans tous les lieux rassemblant des jeunes aux quatre coins du diocèse. Cinquante places étaient proposées ; 34 jeunes s’inscrivirent pour ce premier bus diocésain.

On s’attendait à davantage mais, en définitive, pour une première, un groupe de moindre importance se révéla être une chance pour une meilleure réussite du bus diocésain.

34 jeunes : 17 garçons, 17 filles rassemblés dans une diversité d’âge (de 16 à 28 ans), de milieu social, d’origine géographique, en études, au travail ou en attente d’emploi et aux caractères variés. Comme pour tout autre rassemblement de jeunes, il fallut constituer le groupe, créer l’ambiance, favoriser les liens. Ce fut, le rôle des six à sept accompagnateurs (selon les jours), laïcs, religieuses, prêtres diocésains. Souvent des hôtes accompagnèrent le bus dans leur ville ou région, micro à la main. L’évêque, Jacques DELAPORTE, fut transporté de CAMBRAI à DOUAI. Hormis quelques tensions inévitables, dues à la fatigue, une ambiance fantastique régna tout au long des cinq journées.

Un bus diocésain : Le choix d’un programme

La découverte d’un diocèse ne pouvait se limiter à la rencontre de paroisses, communautés religieuses ou équipes de prêtres. C’est toute la vie du Valenciennois, du Douaisis, de l’Avenois et du Cambrésis qu’il fallait découvrir dans ses réalités économiques, sociales et culturelles afin de mieux prendre conscience de la mission de l’Eglise dans ce diocèse de CAMBRAI.

L’élaboration du programme des cinq jours essaya d’équilibrer les temps de rencontre, de reprise quotidienne, de prière individuelle ou communautaire, de détente et pour mieux accompagner chacun des participants, un livre de bord de 44 pages fut soigneusement élaboré avec chants, présentation du diocèse, programme et carte de chaque journée, pages blanches pour la relecture et présentation du groupe avec coordonnées de chaque participant.

Le vendredi 27 octobre 1989, à 18 h.30, tout était fin prêt à la maison diocésaine de RAISMES pour accueillir les 34 inscrits pour l’aventure de la rencontre.

Il serait fastidieux de relater en détail la trentaine de communautés humaines et ecclésiales rencontrées au long des cinq jours. La carte ci-jointe donnera une idée de la diversité et de la densité de l’emploi du temps. Sans doute a-t-on souffert du manque de temps de reprise et... de sommeil. Ainsi les préparations des veillées notamment celle de DOUAI, avec 200 jeunes des aumôneries du diocèse entamèrent largement les nuits ! Les 27 bilans renvoyés à l’issue des vacances de la Toussaint placèrent la rencontre au Carmel de VALENCIENNES, la messe à la prison de DOUAI, le partage avec la Mission Ouvrière de DENAIN et la soirée avec les chrétiens du Monde Rural en Avesnois, en tête du "hit parade" (1).

Chacun des comptes-rendus souligna l’accueil formidable réservé au groupe par l’ensemble des communautés hôtes, c’est-à-dire près de 900 personnes dont 400 jeunes (à ORCHIES et DOUAI). Neuf cents personnes manifestement heureuses d’accueillir et de partager leur vie de foi, surprises aussi de l’enthousiasme et de la jeunesse du groupe. Ce fut vraiment une rencontre à double sens, rencontre de réalités humaines, de la diversité des visages d’Eglise, de l’appel du Christ à servir son Eglise.

Pour détailler cette triple découverte, nous avons souhaité garder la formulation des bilans des jeunes.

  • LES REALITES HUMAINES

"On savait mais on ne connaissait pas... ce fut une prise de conscience de réalités inconnues proches de chez moi... j’ai vu un diocèse diversifié : milieu rural, ouvrier, urbain..."

- "DIVERSITES ET CONTRASTES"

  • les pauvretés : "au niveau économique, social, affectif et culturel, une crise qui touche villes et campagnes avec le chômage et les départs... des dures réalités éloignées de ma vie quotidienne mais proches de chez moi... nous sommes tous des pauvres potentiels".
    "une société économiquement forte mais qui crée la misère matérielle et spirituelle... on ne mesurait pas la pauvreté, son intensité, sa proximité".
  • les richesses. : "des gens se relèvent, agissent, réagissent, se battent pour un monde meilleur avec la volonté de réussir. Quel espoir, quel dynamisme des militants gui veulent faire face... rien n’est jamais perdu : aller à la rencontre de l’autre, écouter et partager, aider et non assister... travailler avec eux et non pour eux... L’espérance d’un avenir meilleur à construire ensemble en osant l’espérance. . "

- "UN DIOCESE OU DIEU M’APPELLE A VIVRE"

"Je me sens en union avec tout le diocèse... une Eglise présente avec les hommes... qui a un rôle, un témoignage à donner aux gens du diocèse., qui sert les pauvres... qui témoigne d’une autre réalité (Carmel)
"Dieu nous appelle tous, d’où que nous venions à travailler à rendre notre diocèse plus beau...
"Appelé à vivre dans ce diocèse, avec la force de la foi, pour faire vivre ce diocèse"

  • - LES VISAGES d’EGLISE

- UNE EGLISE d’ESPERANCE

"Espérance en Dieu, en l’avenir,., qui pousse à agir, à réagir, celle des jeunes, de ceux qui les accompagnent...
La volonté de s’en sortir malgré tout, des gens qui se défoncent...
Une énergie ; une force dans ces hommes et ces femmes passionnés., qui donnent le meilleur d’eux-mêmes... et confiance..
Une mobilisation pour retrouver un équilibre entre la société et l’homme"

- UNE EGLISE CROYANTE

"Foi profonde... qui est et qui reste profonde dans les moments difficiles... Des gens qui décident, dans leur milieu, de vivre leur foi... cette présence du Christ au cœur de l’action. Christ proche de tous les hommes quels qu’ils soient... nombreux jeunes dynamiques et sûrs de leur foi... attachement des gens à leur engagement malgré les difficultés.. L’effort des laïcs à vivre leur foi en s’engageant dans différents mouvements ? Ils répondent présents".

- UNE EGLISE PRIANTE

"La prière est importante... le silence... oeuvre de l’Esprit dans le cœur de chacun... l’Eglise grandit dans l’Amour de Dieu".

- UNE EGLISE PLURIELLE

"L’Eglise est diverse, chacun est différent, chacun à sa place... chacun apporte sa pierre... une diversité des membres nécessaire mais presque paradoxale... Nécessité de s’accepter les uns les autres car TOUT est indispensable... Former une communauté d’Eglise, faire EGLISE, vivre ensemble... casser les frontières et les préjugés... Tous différents, mais d’accord...Différentes vocations complémentaires.. Différents visages du Christ... mais qu’elle soit unie."

- UNE EGLISE PROCHE

"Une Eglise vivante au cœur du monde, solidaire de ses frères... proche des gens... présente auprès des hommes... ouverte aux réalités de son peuple... qui agit pour redonner espoir... tout en se démarquant de la société.."
"Devoir de l’Eglise à aider les laïcs à répondre à leur vocation de baptisés".
"Elle a les ’pieds solides’, des bases sûres qui aident dans le cheminement vers Dieu, dans l’amour du Christ et des hommes."

- UNE EGLISE PAUVRE

"Une Eglise présente auprès des plus démunis... de ceux qui n’ont plus rien..."
"La pauvreté du diocèse fait mal mais nous invite à se faire pauvre, se dépouiller et tout pour aller vers l’autre, l’écouter, l’aider... une Eglise humble..."
Et aussi une Eglise joyeuse, souriante, accueillante et lucide vivant l’Evangile au quotidien en donnant et recevant.

  • "CHRIST AUJOURD’HUI NOUS APPELLE

Ce chant souvent repris au long des cinq jours, exprime l’appel qui a retenti dans le cœur des uns et des autres. Certains l’ont exprimé dans leur bilan.

- SUIVRE JESUS AU COEUR DU MONDE

"Suivre Jésus dans son attitude avec le petit, le faible... témoigner de sa Bonne Nouvelle avec enthousiasme... Servir Dieu et le faire connaître au monde entier mais ma réponse ne sera jamais à la hauteur de l’appel que j’ai reçu... Serviteur de mon Dieu et des hommes, vivant en chrétien au cœur du monde en ouvrant les yeux sur ce qui se passe autour de moi... vivre au service des plus pauvres... pas facile... faire AVEC et non pour les autres."

- TEMOIN DE LA FOI

"Dans la foi... me donner pleinement... appelé à l’écoute des autres., être chacun parole et acte du Christ... que l’Evangile soit nôtre aujourd’hui, témoin de la vie du Christ à présenter aux autres..."
"Dieu est là pour me soutenir dans la prière... la prière silencieuse... en goûtant l’Eucharistie, ce don formidable."

- EN EGLISE DIOCESAINE

"Vivre en témoin dans une Eglise vivante pour que le monde vive mieux... Etre de cette Eglise, un seul corps avec tous, enraciné en Christ... me tourner plus sur les réalités de l’Eglise... missionnaire dans et pour l’Eglise de CAMBRAI... religieux ou laïc, je ne sais pas."

Vers un second bus diocésain

Le 28 janvier 1990, cent-vingt personnes : jeunes, familles, hôtes divers, se sont rassemblés à la maison diocésaine pour une reprise des cinq jours de périple au moyen d’expo-photos, de montages vidéos et diapos. Chacun se demandait quand se renouvellerait cette découverte de l’espace diocésain par des jeunes désireux de servir l’Eglise.

L’impact sur les diverses communautés visitées, les bilans des jeunes participants au bus, l’écho de la Presse locale et diocésaine, l’enthousiasme général et le regret de ceux qui n’avaient pas voulu ou pu participer, poussèrent le Bureau diocésain à une décision que chacun imaginera facilement : il y aura un second bus diocésain à la Toussaint 1991...


NOTES -------------------------

1) Le numéro spécial de "EGLISE DE CAMBRAI" sur le bus diocésain est disponible au Service Diocésain des Vocations, 5 / 11, rue des Frères Lumière - 59880 SAINT SAULVE contre 4 timbres à 2,30 F [ Retour au Texte ]