La pastorale des vocations aujourd’hui


Claude DIGONNET,
prêtre du diocèse du PUY,
coordonnateur du Service National des Vocations

Il m’est demandé de partager avec les lecteurs de "JEUNES ET VOCATIONS" les convictions fondatrices de la pastorale des vocations dans le contexte d’aujourd’hui.

Quand on mesure à quel point le monde a changé et évolué depuis un an seulement, et de façon tellement inattendue, on hésite quelque peu à considérer "le contexte d’aujourd’hui" comme un élément important à prendre en compte dans une réflexion comme la nôtre. Qui sait si l’année gui vient ne va pas apporter encore de grands bouleversements du côté du Tiers Monde ?

Mais je retiens que cet article prend place modestement dans un ensemble intitulé "UNE EGLISE DIOCESAINE AU SERVICE DES VOCATIONS". Pour moi, il n’y a pas de doute : l’Eglise diocésaine est le lieu par excellence où doit se développer cette pastorale de toutes les vocations, et c’est comme la pierre de touche de sa vitalité. Je dis cela à partir de ma propre expérience. Prêtre diocésain, je n’ai été en rien confiné aux limites de mon Eglise locale d’origine : à deux reprises j’ai été "envoyé" par elle au service d’une jeune Eglise d’Afrique, et me voilà, pour un temps encore, hors de mon diocèse, pour un service plus large dans l’Eglise de France. Cette nouvelle expérience m’aide aussi à découvrir comment toute l’Eglise locale s’ouvre à une dimension plus large et à la communion avec l’Eglise Universelle en éveillant et accompagnant des jeunes sur le chemin de la vie religieuse et de la vocation missionnaire proprement dite.

C’est donc à travers cette expérience vécue et surtout à la lumière des orientations officielles de l’Eglise que je vais tenter de partager avec vous les convictions fondatrices de la pastorale des vocations.

Précisément parce qu’ils sont Services de pastorale, tant au niveau national que diocésain, les Services des Vocations (S.N.V. - S.D.V.) relèvent de l’autorité des évêques. Il était donc normal, pour leur bon fonctionnement que la Conférence des Evêques en précise les orientations. Cela a été fait pour la France dès 1971, dans un document promulgué par l’Episcopat et intitulé "L’ESPRIT, LE SENS ET LES MOYENS d’UNE PASTORALE DES VOCATIONS". Ce texte s’inspirait très largement des acquis du Concile, s’appuyant spécialement sur la Constitution dogmatique "Lumen Gentium" et le décret sur la charge pastorale des évêques (Christus Dominus).

Dix ans plus tard, en 1981, du 10 au 16 mai, un Congrès mondial des évêques et responsables nationaux des Services des Vocations se tenait à Rome autour d’un thème ainsi annoncé :

Développement du soin pastoral des Vocations
dans les Eglises particulières
expériences du passé et programme pour l’avenir.

L’année suivante, à l’occasion de la Journée Mondiale des Vocations 1982, paraissait le document final que les Editions du Centurion publiaient en février 1983, dans la série "Documents d’Eglise". On peut donc considérer que ce texte est la véritable charte de nos Services des Vocations, le recueil de nos convictions fondatrices.

Dans la préface de cette édition, Mgr Jean VILNET, alors Président de la Conférence épiscopale française et évêque de SAINT DIE, souligne d’abord la nécessaire prise de conscience de la part de tout chrétien de sa responsabilité par rapport à ce "problème fondamental de l’Eglise" selon l’expression du pape Jean Paul II, le jour même de l’inauguration du Congrès mondial.

Le Père VILNET écrit un peu plus loin dans la préface : "Voici quelques convictions fondamentales qui me semblent devoir particulièrement retenir l’attention". . .

C’est en m’appuyant sur ces points forts que je propose les étapes suivantes dans ma réflexion. Ce n’est ni exhaustif, ni selon un ordre tout à fait impératif.

  • La Vocation de l’Eglise, c’est la Mission.
    L’Eglise est destinée à la Mission. Toutes les vocations dans l’Eglise en seront marquées
  • L’Eglise est une communauté d’appelés.
    L’appel concerne tous et chacun en Eglise.
  • Il y a cependant, pour la vie et la Mission de l’Eglise, des vocations particulières qui sont le domaine propre des Services des Vocations.
  • L’initiative de l’appel appartient à Dieu, sans que soient pour autant court-circuités ni les médiations humaines et ecclésiales, ni les projets humains d’un être libre.

1 - L’EGLISE EST DESTINEE A LA MISSION

Conviction

"En premier lieu : la Mission", écrit le Père Vilnet, annonçant quelques convictions fondamentales pour la pastorale des vocations.

"Dieu veut que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la connaissance de la vérité " (1 Tim.2, 4).

Cette volonté de Dieu s’est traduite l’heure venue dans la Mission de Jésus qui se reconnaît l’Envoyé du Père et, de la part du Père, envoie l’Esprit à l’Eglise, chargée elle-même de déployer la Mission du Christ dans l’espace et dans le temps.

Il faut relire les paragraphes 1 à 4 du premier chapitre de la Constitution sur l’Eglise. Nous y retrouvons ces affirmations, ces convictions absolument fondamentales.

"Dieu veut que tous les hommes... parviennent à la connaissance de la vérité, Mais, enchaîne le Document du Congrès mondial, comment pourront-ils en entendre parler, sans qu’on la leur annonce ? Et comment la leur annoncera-t-on sans qu’il y ait d’abord des envoyés ? (Rom 10, 14-16). Aujourd’hui la réponse à l’appel devient d’autant plus urgente que l’Eglise "sacrement universel de salut" doit répondre au défi d’un monde nouveau (p. 21)

L’Eglise est destinée à la Mission... L’Eglise est pour le monde... pour l’évangélisation du Monde.

L’Eglise d’aujourd’hui est pour le monde d’aujourd’hui, pour l’Evangélisation du monde d’aujourd’hui et de demain.

"Mission au-delà des frontières... mission chez nous", commente le Père VILNET.

Il serait dommage que certaines discussions souvent très chaudes nous fassent oublier l’essentiel : annoncer l’Evangile aux hommes d’aujourd’hui.

Vous connaissez, comme moi, tout le débat très actuel, autour d’expressions comme "nouvelle évangélisation", "seconde évangélisation". Bien sûr, derrière les mots et au-delà des mots, il y a des manières de voir et de se situer qui sont très différentes. Il me semble que parler d’évangélisation d’un monde nouveau, d’une culture nouvelle permet de mieux se situer car ce qui est nouveau, c’est le monde, c’est la culture, et la vraie question c’est d’apporter à ce monde nouveau, à ces cultures nouvelles, le ferment évangélique, de "répondre au défi d’un monde nouveau".

On s’oppose parfois encore à partir de considérations sur la priorité à donner à la communion sur la mission, ou à la mission sur la communion...

J’ai retenu d’un livre de Jacques LOEW : "Vous serez mes disciples" une remarque qu’il fait à ce sujet, remarque qu’il emprunte au Père CONGAR à propos de l’étymologie de "communio" : les deux "m" ne se justifieraient que par recours à l’étymologie et au mot latin "munus" : fardeau, charge., communio signifiant alors la charge portée ensemble ; la mission commune.

Même si ce n’était qu’un jeu de mots, il nous aiderait à comprendre - ce que l’expérience permet de vérifier - que c’est bien le souci de la mission portée ensemble, la conscience commune de l’urgence et de l’importance de l’évangélisation qui fait la communion. En ce sens nous pouvons dire que la communion naît de la mission...

Il reste vrai que l’efficacité de la mission est souvent liée à la communion, au témoignage d’unité de ceux et celles qui annoncent l’Evangile. Jésus lui-même a prié pour que ses disciples restent dans l’unité, afin que le Monde croie que Jésus est l’envoyé du Père. La Communion, l’Unité sont alors la condition de la réussite de la Mission.

Dans l’excellent éditorial du dernier numéro de CHRISTUS (janvier 1990), le Père Claude FLIPO articule ainsi Communion et Mission :

"Etre envoyé au monde dans une Eglise-communion, c’est concevoir la mission d’une nouvelle manière, comme une oeuvre de réconciliation entre races, classes et nations, comme une nouvelle synthèse entre la foi et les cultures, une nouvelle évangélisation."

Plus que jamais, en tous cas, nous pouvons mesurer le sérieux de ces paroles du Seigneur "La moisson est abondante mais les ouvriers peu nombreux" (Lc 10, 2) "Levez les yeux et voyez : les champs sont blancs pour la moisson" (Jn 4, 35) "Allez, vous aussi, travailler à la vigne " (Mt 20).

Il ne faudrait surtout pas que des débats et discussions, qui ne seraient que des querelles de mots, fassent oublier l’essentiel et tiennent lieu d’annonce de l’Evangile.. J’ai vécu cela au Cameroun, à propos de traduction de l’Evangile dans une des multiples langues locales. Au nom de la connaissance de la langue, du "génie" de la langue, tout un travail de traduction oecuménique se trouvait bloqué parce que deux "clans" s’opposaient ; deux écoles de traduction se disputaient au sujet de l’emploi du style direct ou du style indirect... Il a fallu qu’un pasteur protestant joue les conciliateurs et invite à revenir à l’essentiel : traduire pour le peuple de Dieu, dans sa langue, la Bonne Nouvelle de l’Evangile. C’est dans une situation de ce genre, qu’un prêtre camerounais, un sage et un saint, disait avec humour et gentillesse : "vous les Blancs, ne nous apportez pas vos fièvres".

Les champs sont blancs pour la moisson... le blé et le raisin, tout est mûr. Va-t-on attendre que passe la grêle ou la tempête qui risque de tout anéantir ? Va-t-on laisser pourrir et gaspiller toute une récolte ? Ici et ailleurs, il y a urgence. Plus que jamais le monde a besoin de l’Evangile.

Ligne d’action : En lien avec cette conviction que l’Eglise est destinée à la Mission, se dégage une ligne d’action que le Père VILNET exprime ainsi "quand nous travaillons en pastorale des vocations, il ne s’agit pas de faire vivre une Institution, mais d’entendre tous l’appel à la Mission".

Conséquences

Ce qui aura des conséquences dont je ne fais qu’énumérer quelques-unes :

  • Si la mission est première, si l’évangélisation est nouvelle parce que le monde est nouveau, parce que la culture, les cultures sont nouvelles, il faut non pas se désolidariser de ce monde ou de ces cultures, ni les renier, mais apprendre à les connaître, à y discerner peu à peu le bon grain et l’ivraie, sans vouloir trier trop vite. Il y a le temps de l’incarnation, il y a l’effort d’inculturation. C’est important pour nous, c’est important pour notre pédagogie d’accompagnement.
  • Si l’Evangile est pour les hommes d’aujourd’hui et pour tout homme, s’il est Bonne Nouvelle pour l’homme d’aujourd’hui, conformons notre attitude à celle de Jésus, ami des hommes, avec un a-priori de bienveillance et un refus absolu du mépris de qui que ce soit. Jésus ne méprise personne. Il laisse cette attitude aux Pharisiens.
  • Il y a, certes, plusieurs manières de vivre la mission et d’être fidèle à la vocation à la Mission, mais le souci de l’Annonce de l’Evangile doit rester premier, y compris dans la prière, la vraie prière chrétienne qui commence par "Que ton Nom soit sanctifié.., que ton règne vienne".

Jésus lui-même a vécu sa mission de manière différente à travers des étapes et des choix de vie successifs : temps de l’inculturation à Nazareth, temps de l’annonce proprement dite, temps du Serviteur souffrant.

2 - L’EGLISE EST UNE COMMUNAUTE d’APPELES

Conviction L’appel concerne tous et chacun en Eglise.

Sur cette prise en compte de la vocation première, de la vocation baptismale, comme fondement de toutes les autres, il est facile, je crois, de constater une avancée dans la conscience du peuple chrétien.

Il y a sûrement bien des façons d’en parler et d’expliciter ce qu’est la vocation baptismale.

On peut en parler en termes de sainteté et de mission : appel universel à la sainteté, appel universel à la mission.

On peut en parler en termes de don reçu et de responsabilité.
On peut en parler en termes de consécration et de service.
On peut en parler en termes d’ETRE et de FAIRE.

Personnellement, j’aime bien relier cette vocation baptismale à la parole qui accompagne l’onction avec l’huile parfumée, après le rite de l’eau au baptême : "Te voilà désormais membre de Jésus-Christ, prêtre, prophète et roi".

Cette triade n’est pas uniquement d’origine liturgique. Elle apparaît au moins à six reprises dans le document conciliaire "Lumen Gentium" et en particulier au §.31 dont une partie est reprise dans l’exhortation apostolique sur les Fidèles Laïcs, au n° 9 :

"Sous le nom de laïcs on entend l’ensemble des chrétiens qui... étant incorporés au Christ par le baptême, intégrés au Peuple de Dieu, faits participants à leur manière de la fonction sacerdotale, prophétique et royale du Christ, exercent pour leur part, dans l’Eglise et dans le Monde, la mission qui est celle de tout le peuple chrétien".

Mais surtout ce triplé tire son origine de la 1ère Lettre de Pierre :

"Comme des pierres vivantes, vous êtes édifiés en maison spirituelle pour constituer une sainte communauté sacerdotale... Vous êtes la communauté sacerdotale du roi... pour que vous proclamiez les hauts faits de celui qui vous a appelés des ténèbres à sa merveilleuse lumière" (Chap. 2, 5 et 9).

Pour l’approfondissement et l’enrichissement de la réflexion sur la vocation baptismale d’abord, mais aussi sur toute vocation dans l’Eglise, rien ne vaut, me semble-t-il, un regard prolongé sur l’Evangile pour y découvrir comment, par des choix et des refus, Jésus a été et n’a pas voulu être prêtre, prophète et roi,

- lui, fils de Marie et fils de Dieu, n’était pas de la tribu de Lévi, ni prêtre à Jérusalem pour offrir des sacrifices d’animaux ; il s’est offert lui-même à la louange et à la gloire de son Père,

- lui, charpentier de Nazareth, le voilà qui parle et qui agit, témoignant de la vérité jusqu’à y risquer sa vie ; il n’est pas seulement prophète en paroles, il dit et il fait,

- lui, Maître et Seigneur, de la descendance de David, il se fait serviteur, sans jamais refuser d’assumer ses responsabilités mais sans jamais chercher à s’emparer du pouvoir.

La vocation chrétienne à la suite de Jésus sur les chemins de la louange et de l’offrande (le sacrifice de louange) sur les chemins du témoignage, sur les chemins du service royal, c’est-à-dire libre, c’est la vocation de tout baptisé, si bien qu’on peut parler très justement de l’Eglise comme peuple de prêtres, peuple de prophètes, peuple de rois, assemblée des saints.

Ligne d’action : à partir de cette conviction :
Dans notre pastorale des Vocations spécifiques, nous avons toujours à rappeler la vocation première du baptisé-confirmé dans l’Eglise, peuple de Dieu. On ne peut jamais faire l’économie de cette première étape fondamentale. On ne peut jamais court-circuiter cet appel premier.

Quelques conséquences

  • Face à un jeune, quel qu’il soit, nous avons à éveiller ou réveiller en lui cette vocation baptismale et l’aider à y répondre de mieux en mieux. "On n’a jamais fini d’être chrétien", déclarait Jean Paul II aux chrétiens de KINSHASA, dans un pays, un continent où l’on entend parfois les gens dire : "j’ai gagné le baptême"... Ailleurs, la même voix interrogeait : "France, qu’as-tu fait de ton baptême ?". Chaque année, le Carême et la Semaine Pascale sont le temps favorable, un temps fort, pour une prise de conscience de cette vocation baptismale.
  • Cette vocation commune peut se vivre sur trois registres selon les appels de l’Esprit et les besoins des communautés auxquelles chacun appartient :
    - l’offrande et la louange (dimension sacerdotale),
    - témoignage et engagement apostolique (dimension prophétique),
    - service professionnel et engagement social (dimension royale).
    Et ceci dans le respect des diversités et des situations de chacun tout en sachant qu’aucune vie chrétienne ne peut écarter complètement l’une de ces trois dimensions. Inviter un jeune qui demande la Confirmation à préciser sur quel chemin de cette vocation baptismale il se sent plus personnellement appelé pourrait permettre parfois un premier discernement pour une éventuelle vocation spécifique. "Est-ce que tu n’as jamais pensé à aller encore plus loin ?".
  • L’ouverture à la vie en Eglise fait partie de cette vocation fondamentale. Il s’agit bien pour chaque baptisé-confirmé d’entrer comme "pierre vivante" dans la construction de l’Eglise, Peuple de Dieu, Corps du Christ, Temple de l’Esprit. L’Eglise s’incarne nécessairement en un lieu où le chrétien plantera ses racines. Le risque est grand aujourd’hui, à cause de la mobilité liée aux études et aux emplois, que beaucoup de jeunes soient déracinés ou plutôt sans racines "Le vent les promène. Ils manquent de racines, ça les gène beaucoup". C’est dans "Le Petit Prince" le point de vue d’une fleur sur les hommes. Il est bien vrai que le lien vérifié et fortifié avec une Eglise particulière est important pour devenir attentif aux appels de l’Esprit et de l’Humanité.
  • Autre conséquence, autre remarque liée à cette réflexion sur la vocation première et fondamentale : ceux et celles qui ont répondu à un second appel vers des vocations particulières savent bien qu’à longueur de vie ils ont à épanouir toujours mieux leur vocation de baptisé. "Evêque pour vous... Chrétien avec vous"... Le renouvellement des promesses du baptême dans la nuit de Pâques et sa préparation dans le temps du carême, concernent tous les membres du Peuple de Dieu.
  • A partir de cette réflexion sur la vocation baptismale, ne pouvons-nous pas aussi remonter encore plus haut, à la vocation la plus fondamentale de toutes, celle que le Créateur propose à l’être humain pour qu’il devienne pleinement homme ou femme. "Choisis la vie" qui t’a été donnée. Choisis de vivre. Choisis d’être homme, femme, de l’être pleinement, selon ce qu’il t’a été donné d’être. Choisis d’aimer et choisis de donner la vie. Il me semble qu’une réflexion sur le mariage comme choix, comme vocation, peut partir de là avec une perspective très large incluant diverses façons d’aimer et de faire naître à la vie. Cette réflexion permet d’autres approfondissements. Il s’agit aussi d’assumer ce que nous n’avons pas choisi : la vie elle-même, le sexe, la famille, le pays, l’époque où nous sommes nés. Il s’agit de reconnaître par là que nous sommes conditionnés et limités, de reconnaître aussi que tout nous a été donné. Etre fidèle à sa vocation humaine, c’est prendre en compte ces dons, les apprécier chez nous et chez l’autre, et les mettre en oeuvre.
  • Compte-tenu de ces remarques, une véritable collaboration avec de multiples partenaires - parents, éducateurs, catéchistes, aumôneries, mouvements, et services divers, paroisses - s’avère indispensable pour un bon enracinement humain et chrétien de ceux et de celles qui pourraient être appelés à une vocation spécifique. C’est en ce sens que le document du Congrès de Rome, au n° 39, interpelle parents et éducateurs "une solide éducation humaine prépare dans les enfants un terreau meilleur pour l’éducation chrétienne elle-même".
    On pourrait tout aussi bien monter d’un degré encore et affirmer : une solide éducation chrétienne prépare dans les jeunes un terreau meilleur pour l’aboutissement des vocations particulières.

3 - NECESSAIRES A LA VIE ET A LA FIDELITE DE l’EGLISE : DES VOCATIONS PARTICULIERES

Les deux perspectives fondamentales précédentes étant admises,
LA RESPONSABILITE PROPRE D’UN SERVICE DES VOCATIONS EST d’ETRE ATTENTIF AUX VOCATIONS PLUS SPECIFIQUES : ministères ordonnés, consécration religieuse et séculière, vocation missionnaire, QUI SONT ESSENTIELLES ET VITALES POUR 1’EGLISE. (Préface VILNET, p. 2)

... Essentielles et vitales pour que l’Eglise soit l’Eglise
... Essentielles et vitales pour qu’une Eglise particulière soit vraiment ce qu’elle doit être "expression de l’Eglise, une, sainte, catholique et apostolique".. (C.D.ll). cf. "Intentions du congrès au début du document final de Rome, 1981.
... Essentielles et vitales, pour que soit mieux vécue la vocation commune des baptisés-confirmés.

Sans l’Eucharistie et ses ministres ordonnés, sans le témoignage vigoureux de choix évangéliques radicaux vécus en communauté religieuse ou en plein monde par des hommes et des femmes, au nom de Jésus-Christ et pour le suivre, dans une consécration totale de leur être, c’est la survie même du Peuple de Dieu qui est menacée. "Ne laissons pas mourir la terre, ne laissons pas mourir le feu..." De même que la disparition de la couche d’ozone peut inquiéter parce qu’elle est une menace pour la survie de l’humanité, de même la raréfaction des vocations spécifiques pourrait être signe d’un manque de vitalité de l’Eglise. "Lié à son évêque et par lui rassemblé dans l’Esprit Saint, grâce à l’Evangile et à l’Eucharistie, le diocèse constitue une Eglise particulière en laquelle est vraiment présente et agissante l’Eglise du Christ". Cette affirmation claire, tirée du décret conciliaire sur la charge pastorale des évêques (n° 11) laisse bien entendre que l’existence et la vitalité même de toute Eglise particulière sont liées à ces deux sources d’énergie que sont l’Evangile et l’Eucharistie. Ministères ordonnés à l’Eucharistie et consécrations diverses pour des engagements de vie évangélique et missionnaire sont, redisons-le, des vocations essentielles et vitales pour l’Eglise.

D’autre part, dans la Préface des conclusions du Congrès de Rome, le Père VILNET reprend une remarque qui figure au n° 37 du document lui-même :

"Dans la pastorale des vocations, personne ne peut s’isoler et travailler exclusivement pour son propre compte ou son Institution... On travaille ensemble en restant soi-même. Rendre compte de sa propre vocation est une richesse pour tous. Regarder au-delà des intérêts particuliers est le devoir de chacun."

Ligne d’action : Il s’agit donc, pour nous, et au nom d’une Eglise particulière, d’éveiller les chrétiens et spécialement les jeunes à ces vocations spécifiques et de leur apporter une aide pour un premier accompagnement et discernement.

Quelques conséquences

  • S’il est vrai que les vocations spécifiques sont le domaine propre des Services des Vocations, n’hésitons pas à laisser à d’autres ce qui leur revient. La pastorale de préparation au baptême relève du catéchuménat. L’éveil et l’accompagnement de la vocation baptismale relève de la pastorale et de la catéchèse ordinaire. Si vocation au mariage il y a, cela relève de la pastorale dite familiale.
    Il ne s’agit pas, évidemment, de vouloir obstinément découper les choses en tranches, mais tout simplement de collaborer dans la clarté et de respecter certaines étapes.
  • Qui veut la fin, veut les moyens. Pour cette pastorale des Vocations spécifiques, il s’agit donc de se donner les moyens nécessaires :
  1. Et d’abord, puisque cette pastorale concerne toutes les vocations spécifiques, constituer au niveau de chaque diocèse des équipes diversifiées en tenant compte non seulement de la diversité des vocations, mais aussi du fait que cette pastorale est l’affaire de tout le peuple de Dieu. D’où la présence indispensable, dans ces équipes, de laïcs à côté des prêtres, des religieux, des religieuses, des missionnaires et des membres d’Instituts séculiers. Par sa seule composition, l’équipe devient ainsi un signe de ce qu’est l’Eglise, Peuple de Dieu, en co-responsabilité diversifiée.
  2. Développer une pédagogie de l’éveil à ces diverses vocations spécifiques avec tout ce que cela suppose de connaissance des jeunes, de recherche avec les divers partenaires, d’initiatives multiples, de propositions de toutes sortes, de recours aux "médias".
    Il est évident que ce domaine de la pastorale de l’éveil aux vocations spécifiques est une des tâches primordiales de nos services, sinon LA préoccupation première... Elle est première dans le temps, c’est certain, par rapport à l’accompagnement. On peut dire aussi qu’elle est première en importance.., comme les semailles par rapport au temps de la croissance et à la moisson.
    D’autre part, c’est une activité pastorale qui laisse place à une multitude d’initiatives aussi variées que peuvent l’être les époques de l’histoire des hommes et de l’Eglise, les situations locales des Eglises particulières, les charismes de ceux et de celles qui se consacrent à ce travail parce qu’ils y sont appelés par leurs diocèses ou leurs instituts. En ce domaine comme en d’autres, il s’agit de ne pas étouffer l’Esprit ni de "risquer de se trouver en guerre - ou tout au moins en désaccord - avec Dieu" (Ac 5, 39).

Ceci étant dit, et sans vouloir freiner les initiatives mais plutôt pour les susciter, il est bon de développer quelques considérations autour de cette pédagogie de l’éveil aux vocations spécifiques. Et ceci à partir de questions toutes simples : pourquoi éveiller ? comment éveiller ? à quoi éveiller ? quand éveiller ? à qui d’éveiller ?

- POURQUOI EVEILLER ?

La question n’est pas sans importance. En effet on pourrait se dire, et on entend dire : "La vocation c’est l’affaire de Dieu" ou encore "c’est l’affaire de chacun, dans sa conscience et sa liberté". Tout en reconnaissant ce qu’il y a de vrai dans ces remarques, nous ajoutons : "c’est aussi l’affaire de l’Eglise".

Ce qui s’oppose à l’éveil, c’est le sommeil..., c’est le rêve, c’est l’oubli, c’est 1’étourdissement... qui peuvent être des conduites de fuite, par rapport précisément à la voix de Dieu, à la voix de sa conscience. "Je me tiens à la porte et je frappe., si quelqu’un entend ma voix...". Ce n’est pas évident d’entendre ni surtout d’écouter... Par rapport à la Parole de Dieu, Parole écrite et Parole inscrite dans le cœur de chacun, la Mission de l’Eglise est d’insister à temps et à contre-temps.., de rendre attentif.

- COMMENT EVEILLER ?

  • En servant la disponibilité et la liberté, ce qui veut dire en rejoignant désirs, souhaits, projets de vie, d’hommes et de femmes, dans ce qu’ils ont de meilleur pour eux et pour le monde ,
  • en sensibilisant aux besoins de la Mission de l’Eglise à l’égard du monde d’aujourd’hui,
  • en se situant dans la perspective fondamentale de l’Alliance, dialogue d’amour incessant entre Dieu et l’humanité,
  • en faisant appel à des témoins de ces vocations auxquelles on veut éveiller, témoins divers et diversement situés.

- QUI EVEILLER ?

Particulièrement les jeunes à l’heure des choix de vie, sans exclusive, d’autant que tous sont appelés à mûrir leur vocation d’homme et de chrétien. Mais en se laissant guider

par les choix habituels de Dieu "qui ne regarde pas aux apparences" (1 Sam. 16,7)
par les choix antérieurs faits par de jeunes chrétiens.

Je ne sais qui a dit "l’orientation, la réussite de la vie dépend de deux ou trois choix précis faits autour de l’âge de 20 ans".

- QUAND EVEILLER ?

  • à l’âge de la générosité et des choix majeurs,
  • à l’occasion de circonstances plus favorables : Profession de Foi, Confirmation, Pèlerinage, Rassemblement...,
  • à longueur de vie... car Dieu appelle toujours.

- A QUI d’EVEILLER ?

  • aux parents et catéchistes dès la petite enfance,
  • aux éducateurs,
  • à ceux et celles qui sont eux-mêmes témoins des diverses vocations spécifiques,
  • aux pasteurs, à l’évêque,
  • au peuple de Dieu tout entier.


    3. Développer une pédagogie de l’accompagnement.

Dans la perspective qui est la nôtre, un des premiers éléments à considérer c’est, me semble-t-il, la délimitation dans le temps de cette étape de 1’accompagnement.

Elle se situe entre le moment où quelqu’un a fait connaître un projet encore vague de vocation spécifique et le moment où il opte soit pour la situation de laïc dans l’Eglise, soit pour une entrée en formation dans une "institution" spécifique. Chronologiquement cette étape vient après un temps d’éveil et avant l’accompagnement plus "pointu" d’un séminaire ou d’un noviciat.

Cette limite dans le temps n’est pas la seule. Il est évident, par exemple, que pendant la période considérée, d’autres relations, d’autres influences entreront en jeu qui pourront être aussi une aide pour l’accompagné(e) et que l’accompagnateur(trice) gagnera à prendre en compte.

Sans parler de ce qu’on a longtemps appelé la direction spirituelle, d’autres formes d’accompagnement existent pour la vie spirituelle qui permettent, peut-être, d’en mieux préciser la nature. Qu’on pense à la relation du parrain ou de la marraine dans la préparation d’un baptême d’adulte, ou d’une confirmation ; qu’on pense plus largement encore à l’éducation à la vie de foi et à la vie de prière pour des parents chrétiens conscients de leurs responsabilités vis-à-vis de leurs propres enfants.

Ce qui est commun à ces divers types d’accompagnement que je viens d’évoquer, c’est qu’il s’agit dans tous les cas d’une relation d’aide pour la vie spirituelle considérée comme vie chrétienne sous la mouvance de l’Esprit. Il vaut mieux en effet se rappeler qu’il est, Lui, le grand accompagnateur.

Un trait particulier marque cependant l’accompagnement dont il s’agit ici. C’est un accompagnement pour aider à un discernement.

Reprenant un certain nombre de remarques entendues à VICHY, lors de la session nationale des Vocations, à Pentecôte 89, je retiens ceci :

- l’accompagnateur n’est ni copain, ni directeur, ni bout de bois... il n’est ni un père, ni une mère, ni un grand frère, ni une grande sœur, ni un enfant.

- il est plutôt un compagnon de route, un passeur, un entraîneur de haut niveau., "compagnon selon l’Evangile, c’est à dire un homme de conviction, habité par le mystère trinitaire, sachant se mettre au service des autres, hanté par l’élargissement des frontières de l’Eglise, ouvert à l’amplitude secrète du Royaume qui vient, croyant au travail de l’Esprit dans le Monde et dans l’Eglise" (Père MADELIN)

Tout le travail accompli avant, pendant et après VICHY 89 montre assez l’importance que les services des Vocations attachent à l’accompagnement des jeunes en recherche. Il me semble inutile d’insister sur une conviction largement partagée, et bien au-delà de nos groupes. La principale requête exprimée à VICHY concernait, ne l’oublions pas, la formation à l’accompagnement. Constatons, à ce sujet, que de multiples propositions sont faites et qu’elles débordent très largement ce que nous organisons nous-mêmes. Nous ne pouvons que nous en réjouir.

"Le document du Congrès mondial de 1981 insiste sur l’importance du ministère de l’accompagnement, individuel ou en groupe, et même, de préférence individuel ET en groupe". C’est ce qu’écrit le Père VILNET dans la préface de l’ouvrage déjà cité. Le document lui-même souligne certains avantages de l’accompagnement en groupe "le groupe joue un rôle particulièrement efficace pour la maturation humaine et chrétienne, pour l’acquisition d’un équilibre affectif, pour l’affermissement de la foi, spécialement en des situations de milieu marquées d’une indifférence diffuse et d’incrédulité" (n° 51).

A l’étape de l’éveil comme à celle d’un premier accompagnement, tout le monde est d’accord sur l’importance de la rencontre de témoins engagés eux-mêmes dans l’une ou l’autre des vocations spécifiques... Sans vouloir minimiser l’influence de témoins "super-star", quelquefois trop lointains et plus ou moins inimitables, la fréquentation plus régulière, à l’occasion d’un accompagnement de groupe, de témoins plus proches, hommes et femmes, diversement situés dans l’arc-en-ciel des vocations, sera parfois plus profitable.

4 - LA VOCATION COMME REPONSE DE FOI D’UN ETRE LIBRE

Conviction

L’initiative de l’appel appartient à Dieu, en ce sens que pour l’humanité tout entière, pour le peuple qu’il s’est choisi et pour chacun de ceux qu’il appelle, il s’agit d’entrer dans un projet qui vient de Lui. Reste que des médiations humaines et ecclésiales interviennent et que l’appel de Dieu s’adresse à la liberté de l’homme dans un dialogue incessant.

Croire en un Dieu qui veut faire alliance avec l’homme et entrer en communication avec lui est une conviction fondamentale pour la pastorale des vocations"Dieu a parlé à maintes reprises et de bien des façons par les prophètes… et en tout dernier lieu par son Fils" (Hb l, 1-2).

La pastorale des vocations est une pastorale de l’oreille. Il s’agit en quelque sorte d’exercer à sélectionner l’écoute dans un monde rempli de bruit, ou de faire connaître la "longueur d’onde" parmi de multiples émissions proposées, car autre chose est entendre, autre chose écouter.

"Que les gens tiennent l’oreille sur toi, en bas comme en haut". Ainsi traduisait-on mot à mot "que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel" dans une langue africaine qui ne dispose que d’un vocabulaire réduit où manquent beaucoup de mots abstraits.

Dieu parle, se fait connaître, fait connaître son projet et ce qu’il attend de l’homme. Si l’homme entend, s’il cherche à entendre, s’il écoute il va pouvoir répondre, entrer en dialogue avec Dieu, accueillir la Parole. L’initiative de Dieu sollicite une réponse de l’homme. C’est toute la démarche de foi qui non seulement demande "que devons-nous croire ?" mais "que devons-nous faire ?"

Dans cette démarche, tel ou telle peut se reconnaître plus clairement appelé par son nom, invité à des choix plus précis. Comment alors discerner ce qui semble une volonté particulière de Dieu ? Le Père RONDET, dans un article récent de CHRISTUS (oct. 1989) précise de façon remarquable comment cette volonté de Dieu rejoint la liberté de l’homme et lui donne de s’exprimer encore davantage :

"Compte tenu de ce que tu es, de ton passé, de ton histoire, des rencontres que tu as faites, de la perception que tu peux avoir des besoins de l’Eglise et du monde, quelle réponse personnelle peux-tu donner aux appels que tu as perçu dans l’Evangile ? Ce que Dieu attend de toi, ce n’est pas que tu choisisses telle ou telle voie qu’il aurait prévue de toute éternité pour toi, c’est que tu inventes aujourd’hui ta réponse à sa présence et à son appel !"

Lignes d’action : En pastorale des vocations, nous aurons donc toujours à veiller avec le plus grand soin à respecter, d’une part l’initiative de Dieu à laquelle nous aurons à rendre plus attentif, d’autre part, la liberté de la réponse qui fait partie aussi de la volonté de Dieu...

Quelques conséquences

  • C’est vrai, la seule consigne claire laissée par Jésus aux disciples face à l’étendue des champs à moissonner, c’est un appel à la prière "priez le maître de la moisson d’envoyer des ouvriers à sa moisson" (Lc 10, 2).

    De plus en plus de gens se mobilisent à partir de cette consigne du Seigneur... Certains, depuis longtemps, et pas seulement dans les monastères. Je me souviens de l’insistance du curé de mon village natal dans les années 1940 à I960 ; sans cesse il appelait ses paroissiens et spécialement les familles à prier à cette intention. Je viens de le vérifier : entre 1948 et 1966, dans cette paroisse qui compte un peu plus de deux mille catholiques et six cents protestants, 14 prêtres ont été ordonnés, tous encore vivants et en service.
    Je crois qu’à travers une prière régulière à laquelle on s’oblige, une véritable conscientisation s’opère. Croyons-nous assez à cette efficacité de la prière ? Je ne suis pas trop étonné que dans certaines communautés nouvelles, dans certains mouvements où l’on prend mieux conscience de l’étendue des champs à évangéliser, on redécouvre l’importance de la prière et que des fruits apparaissent.
  • C’est vrai aussi qu’à la veille de sa mort, selon les confidences de l’Apôtre Jean, Jésus disait à ses amis : "Ce n’est pas vous qui m’avez choisi, c’est moi qui vous ai choisis et institués" (Jn 15, 16). Le risque n’est pas totalement illusoire que l’on se donne une vocation particulière, un peu comme un militant politique qui tout à coup découvrirait qu’il a une mission spéciale de sauver un pays qui part à la dérive, ou de conduire à l’indépendance une nation encore asservie. Autant, pour un laïc, de tels projets peuvent relever de sa vocation d’homme et de chrétien, autant, lorsqu’il s’agit de la mission même de l’Eglise à la suite du Christ, le risque est grand de glisser peu à peu vers une forme ou l’autre de messianisme. Après tout, ce fut une tentation pour Jésus lui-même. D’où l’importance d’une autre forme de prière, la prière silencieuse d’écoute de la Parole de Dieu, d’ouverture à l’Esprit qui parle au fond de nous-mêmes et nous "fait accéder à la vérité tout entière" (Jn 16, 13). Une forme de prière que Jésus a pratiqué bien souvent à la recherche de sa vocation et de sa mission, dès l’âge de 12 ans et jusqu’au jardin des oliviers.
  • "Sans moi, vous ne pouvez rien faire... Qui demeure en moi porte beaucoup de fruit" (Jn 15, 5). Encore une affirmation claire du Seigneur lui-même, qui attire notre attention sur la nécessité vitale du lien personnel avec lui pour la fécondité spirituelle de nos vies. Non seulement l’initiative de l’appel appartient à Dieu, mais aussi la fidélité et la "fertilité" de nos engagements à sa suite. La grande prostration pendant la Litanie des Saints impressionne toujours les témoins d’une profession religieuse ou d’une ordination. Cet appel émouvant à la prière de tous les saints par une communauté en prière souligne bien que ce qui est en train de se passer n’est pas seulement une affaire d’homme. Et lorsque celui qui va recevoir l’ordination répond à l’évêque "Oui je le veux, avec la grâce de Dieu", il manifeste ouvertement qu’il ne compte pas seulement sur ses propres forces pour accomplir le ministère qui va lui être confié. Dans la pastorale des vocations, face aux hésitations d’un jeune appelé à prendre une décision, du côté de la vie religieuse ou du ministère ordonné, il me semble très important d’insister fort sur l’engagement du Seigneur et de l’Eglise à ses côtés pour aujourd’hui et pour demain. Et en même temps il sera très important que celui ou celle qui s’engage ait pris conscience de la nécessité d’un ressourcement régulier à l’Eucharistie comme centre de toute vie sacramentaire et lieu d’écoute de la Parole de Dieu.
  • Toujours dans la même perspective et pour ne pas oublier que l’initiative appartient à Dieu dans toute vocation, à son origine et dans son épanouissement, les temps forts des retraites spirituelles ont autant d’importance, avant et pour un discernement, qu’après un choix et pour une fidélité inventive à ce choix premier. Les recyclages ne sont pas seulement d’ordre intellectuel, mais aussi d’ordre spirituel. Cela fait partie de cette "formation permanente" en vue de la "fidélité et du renouvellement" dont il est question à la 5ème partie des "lineamenta" du prochain synode sur la "formation des prêtres dans les circonstances actuelles".
  • Tout ce qui a été dit précédemment à propos de la vocation fondamentale, humaine et chrétienne, et des choix que chacun est amené à faire, y compris en assumant librement ce que les circonstances de la vie nous imposent, tout ce qui a été dit sur l’éveil et l’accompagnement des vocations spécifiques, tout cela a suffisamment mis en relief, d’une part le nécessaire respect de la liberté de celui que Dieu appelle, d’autre part le jeu des médiations humaines et ecclésiales par lesquelles cet appel se transmet. Il ne me semble pas nécessaire d’y revenir ici.
  • Avant de conclure, je ne résiste pas a l’envie de vous recopier quelques lignes qui terminent l’article déjà cité du Père RONDET, dans le n° 144 de CHRISTUS :
  • "Plus qu’une volonté précise, exprimée en règle de vie, les appels nous diront le désir de Dieu, son attente et son espérance : nous voir inventer peu à peu notre réponse. Nous pourrons donc accueillir sans angoisse les hésitations, les échecs et les ambiguïtés de nos choix. Comme le disait Emmanuel MOUNIER ’Dieu est assez grand pour faire de nos erreurs même une vocation’".

Nous le savons bien, la vitalité de l’Eglise ne se mesure pas uniquement au nombre de ses prêtres ou de ses religieux et religieuses, ni même à leur degré de sainteté. Aujourd’hui comme hier, le peuple chrétien, dans ses membres les plus humbles, est capable de réveiller l’Eglise et d’y susciter à tous les niveaux un véritable printemps. Le plus grave serait tout de même que ce peuple de Dieu manque de pain et de soins, faute de bergers, qu’il manque de repères, faute de témoins de la vie évangélique.

C’est pour cela que, là où nous sommes, là où nous travaillons, et dans les responsabilités qui sont les nôtres, nous avons à prier, nous avons à agir pour que l’Eglise particulière, qui est présentement la nôtre, soit un signe plus parlant de la sainteté et de l’amour de Dieu pour les hommes d’aujourd’hui dans le monde d’aujourd’hui.