A partir d’une ordination


Marcel MAURIN
prêtre, membre de l’équipe du SDV du HAVRE

L’ordination d’un prêtre, surtout lorsqu’elle est rare, est l’occasion du rassemblement de nombreux chrétiens. A partir de cet événement, l’équipe du Service Diocésain des Vocations du HAVRE a souhaité provoquer différents jeunes (lycéens, étudiants ou au travail) présents dans les mouvements ou services du diocèse. Un double objectif nous habitait :

- Ecouter les jeunes, ce qu’ils disent de l’Eglise, des vocations (dans un diocèse pauvre en séminaristes et jeunes prêtres).

- Leur faire vivre un temps de rencontre avec le nouvel ordonné, et différents chrétiens déjà engagés dans l’Eglise locale.

> Echos d’un sondage

Un sondage anonyme auprès d’une soixantaine de 15-18 ans, nous fait percevoir ce qu’ils disent des vocations.

Pour les garçons :

  • as-tu déjà pensé à devenir prêtre ? 14 oui, 15 non
  • t’y verrais-tu ? 3 oui, 23 non, 3 en interrogation

Pour les filles :

  • as-tu déjà pensé à la vie religieuse ? 20 oui, 13 non
  • t’y verrais-tu ? 2 oui, 28 non, 3 peut-être

PRENDRE SA PLACE DANS l’EGLISE :

  • "On a tous une place à tenir dans l’Eglise de Jésus-Christ. En effet, suivant nos possibilités, nous assurons la réussite de cette Eglise. Pour mon cas, il n’est pas rare qu’avec d’autres jeunes nous animions les messes sur le plan musical."
  • "Oui, sinon je ne serais pas là ! sans devenir religieuse, j’espère pouvoir vivre dans l’Esprit de Dieu."
  • "Je n’en vois pas, ou alors elle est vraiment très petite."
  • "Je pense que tout chrétien doit jouer un rôle dans l’Eglise car si tous les chrétiens étaient passifs, l’Eglise ne pourrait pas vivre. Il faut que le chrétien s’investisse dans l’Eglise, et soit un soutien pour le prêtre."

SUR LA VIE RELIGIEUSE :

  • "Quand on croit vraiment on veut forcément le faire partager. Je ne pense pas être prête à tous les sacrifices mais c’est vrai que j’ai déjà pensé à la vie religieuse.
  • "J’ai pensé à la vie religieuse mais mon désir d’avoir une famille et des enfants me semble si grand que je ne me crois pas capable de vivre uniquement seule avec Dieu."
  • "La vie communautaire me paraît difficile, en même temps qu’elle m’attire. Je ne sais pas si j’y suis vraiment appelé ou si cela vient de moi."
  • "Si les filles pouvaient devenir prêtre, j’aurais peut-être plus longtemps réfléchi à la question."
  • "Je ne pense pas, pour l’instant, avoir le courage de tout abandonner pour Dieu. Je préfère l’aimer et construire ma vie en fondant une famille. Je ferai connaître à celle-ci ce qu’est pour moi la vie avec Dieu."

SUR LA VIE DE PRETRE :

  • "J’aimerais avoir des contacts comme les prêtres en ont."
  • "Le prêtre, c’est d’abord un être humain comme tous le monde, qui s’est converti dans la foi de Dieu. Il consacre sa vie pour Dieu afin d’aider et d’aimer les hommes."
  • "Etre prêtre c’est difficile : je ne me sens pas capable de parler à une assemblée, et je ne pense pas avoir la patience d’écouter chacun complètement. "
  • "Pour moi, le prêtre c’est un homme qui sait écouter, répondre à des questions de la vie. Avec lui, on peut parler de tout, en toute confiance. Il est disponible, compréhensif et sait réconforter les jeunes qui en ont besoin."
  • "Pour moi, le prêtre sans mariage me paraît un obstacle au partage de vie, à la compréhension."

> Des rencontres

Pour les deux dernières ordinations nous avons proposé une journée de rencontre qui se concluait par la célébration d’ordination. Moment important de ces journées : le dialogue avec des adultes engagés de manière différente dans le monde et dans l’Eglise. Citons quelques visages : le futur ordonné ; un couple, vingt ans de mariage et animateur de second cycle ; une célibataire syndicaliste ; une carmélite ; le délégué diocésain du Secours Catholique, ordonné diacre quelques semaines plus tard, présent avec sa femme et ses enfants ; une religieuse apostolique permanente paroissiale ; un moine et l’évêque.

Ce style de rencontre permet l’expression de toutes les questions qui travaillent les jeunes : "quels sont tes souhaits comme jeune prêtre ?", mais aussi "que veut dire pour toi le célibat consacré ?", "pourquoi prêtre et non pas moine ?", "Comment arrivez-vous à tenir comme couple ?", "Comment se sent-on libre quand on devient religieuse ?", "Les moines ne se sentent-ils pas interpellés par le manque de prêtres diocésains ?", "Qu’est-ce que Dieu apporte à une vie de couple ?", "Comment se sent-on appelé ?", "Comment une femme et ses enfants participent-ils à l’engagement diaconal de leur mari et père ?".

Le fait que quasiment tous les mouvements et services de jeunes du diocèse soient représentés a favorisé la rencontre souhaitée de ces différentes vocations d’Eglise.

A la suite de cette table ronde, ce sont les jeunes qui se sont exprimés pour dire ce qu’ils attendent d’un prêtre aujourd’hui. Voici ce qu’ils ont exprimé à l’évêque durant l’ordination :

"Père, nous pouvons vous dire ce que notre groupe de jeunes attend d’un prêtre aujourd’hui :

  • ce qui est le plus attendu : qu’il soit UN HOMME DISPONIBLE, d’accueil, d’écoute et de conseil, créant le dialogue. Qu’il n’hésite pas à aller au devant des personnes qui n’osent pas l’aborder. Qu’il soit celui à qui on peut se confier librement.
  • Qu’il soit lui-même UN HOMME AU MILIEU DES HOMMES, capable de partager sur les problèmes du monde, ouvert à la rencontre de toutes les personnes de son quartier, y compris les non-chrétiens.
  • Qu’ils nous témoigne de S0N AMOUR POUR DIEU, qu’il n’hésite pas à nous montrer comment on vit sa foi. Et ainsi, il nous guidera dans le cheminement de notre vie chrétienne, en partageant nos préoccupations et nos interrogations.
  • Qu’il soit HOMME d’EGLISE, le pasteur qui la conduit vers Jésus-Christ. On attend de lui qu’il soit le rassembleur des divers groupes de la communauté, facteur de réconciliation et d’unité.
  • Qu’il soit un EVEILLEUR, celui qui nous invite à aller toujours plus loin ; qu’il soit créateur d’un environnement favorable à l’éveil des vocations ; qu’il nous renvoie vers les autres, ceux qui sont le plus éloignés de Jésus-Christ.
  • Et enfin, qu’il ne manque pas d’HUMOUR."

Ajoutons que la première expérience de ce type a permis de rendre visible dans le diocèse la nouvelle équipe S.D.V.

Une centaine de jeunes ayant répondu favorablement à l’invitation de l’ordination, nous leur avons adressé à la rentrée suivante un courrier : invitation à "aller plus loin". Quelque soit la réponse, cette lettre a été bien reçue. Et au-delà de nos espérances, deux équipes de réflexion S.D.V. ont pu voir le jour.