"Ambassadeurs du Christ..."


Odile RIBADEAU-DUMAS

Pour répondre à la demande qui m’est faite, je proposerai quelques points de repère théologiques sur l’accompagnement.
Dans un premier temps, je ferai une brève réflexion sur
l’Eglise et sa mission, à partir d’un texte de l’évangile
de Marc.
Cela me conduira dans un second temps à proposer quelques
critères pour l’accompagnement humain et spirituel des
jeunes.
Et je conclurai en soulignant l’attitude de foi qui me
paraît devoir être au cœur de la vie de tout accompagnateur.

I - A PARTIR de l’EVANGILE de MARC..,

Pour parler de l’Eglise, je choisis à dessein de partir de cet évangile. Pourquoi ?

Nous constatons que les jeunes ont peu accès à un certain langage d’Eglise, parce qu’il leur paraît abstrait, intellectuel, de par sa cohérence même, et peu en prise sur leur existence quotidienne. Au lieu de donner goût à entrer plus avant dans la vie chrétienne, ce langage risque de les maintenir au seuil.

Or, c’est d’abord une plénitude de vie, un éveil, qui a fait naître la communauté chrétienne : l’expérience de la résurrection du Christ. Les premiers chrétiens ont d’abord vécu ensemble, rassemblés dans une communauté qui prie, partage, célèbre et annonce la résurrection et, à partir de cette expérience, ils ont relu le sens de la vie de Jésus et trouvé dans sa vie comme la genèse de la communauté ecclésiale qu’ils vivent. C’est cette expérience qu’ils nous racontent et à laquelle ils nous convient dans le récit des évangiles.

De ce point de vue, le recours à l’Evangile peut renouveler notre langage : la force symbolique des images ré-engendre de l’intérieur notre manière de sentir et de faire Eglise. Dans l’Evangile, en effet, le récit de l’expérience est premier par rapport à la présentation cohérente et organisée du mystère chrétien. Il invite à se risquer sur ce chemin-là, existentiel.

Prenons sur le vif un de ces textes-clés que beaucoup d’exégètes considèrent comme un texte fondateur. Il s’agit de Marc 3, 13-19 :

"Jésus monte sur la montagne et il appelle ceux qu’il voulait. Ils vinrent à lui et il en établit Douze pour être avec lui, et pour les envoyer prêcher avec pouvoir de chasser les démons."

C’est un texte central pour exprimer le sens et la mission de l’Eglise, et donc des différentes vocations dans l’Eglise.

"IL EN FIT DOUZE" - Douze, c’est à la fois un chiffre symbolique qui représente les 12 tribus d’Israël et donc qui signifie toute l’Eglise qui est instaurée, l’Israël nouveau.

Mais c’est en même temps 12 prénoms (et la suite du texte nomme chacun des 12) douze prénoms, c’est-à-dire quelques-uns dans l’Eglise qui vont plus particulièrement signifier dans leur existence la vie ecclésiale tout entière.

Quelle est la mission de cette communauté ecclésiale ? Elle est double et les deux aspects sont indissociablement liés l’un à l’autre :

"Il en établit Douze pour être avec lui et pour les envoyer"

"ETRE AVEC LUI" - II s’agit de cette expérience que tout chrétien est appelé à faire de la présence au Christ ressuscité dans sa vie, comme les disciples l’ont faite.

Ce n’est pas seulement une expérience religieuse, ni même une expérience de Dieu, mais c’est la rencontre du Dieu de Jésus-Christ qui transforme l’existence. Entrer dans ce dialogue de liberté : "Il appelle ceux qu’il voulait -Ils vinrent à Lui", éprouver la consistance de sa personne au cœur de la prière, goûter cet appel à une relation personnelle qui engage tout l’être.

Cet "être-avec Jésus-Christ" est tout entier traversé par un "être-envoyé" aux hommes et aux femmes, au monde.

"POUR LES ENVOYER" - C’est tout l’aspect mission, présence au monde, engagement pour transformer ce monde. Et l’Evangile précise cet envoi, cette mission :
"Annoncer la Parole avec pouvoir de chasser les démons".

* "ANNONCER LA PAROLE" -
C’est une annonce donc, annonce d’une Bonne Nouvelle, Bonne Nouvelle de Résurrection : proclamer qu’il est vivant, présent et acteur dans le monde d’aujourd’hui. Témoigner qu’avec le Christ, un avenir est possible, toujours possible pour soi, pour ses proches, pour tout homme.
Laisser retentit au cœur de chacun cette conviction qui est la source de notre foi : notre monde est sauvé ; le salut nous est donné ; il est là, à l’œuvre, dans le monde, l’Eglise et chacun de nous.

Proclamer la parole ce n’est pas d’abord enseigner des principes éthiques et des vérités dogmatiques, même si la Bonne Nouvelle de la Résurrection du Christ comporte principes éthiques et vérités dogmatiques. Mais c’est témoigner de cette insurrection de vie, de justice et d’amour au cœur même d’un monde marqué par le péché.

C’est à l’Eglise "sacrement de salut" et donc à nous aussi de tenir ainsi le monde dans l’Espérance par cette Parole de vie à annoncer.

* "Annoncer la Parole AVEC POUVOIR DE CHASSER LES DEMONS"
Chasser les démons, qu’est-ce à dire ? Hier le Père Madelin parlait du "diabolos" et de ses ruses à débusquer. Dans l’Evangile, un homme possédé d’un démon est un homme aliéné, dans la confusion, la non-vérité par rapport à lui-même et par rapport aux autres ; aux prises avec des forces de mort qui l’empêchent de vivre. Il est hors de lui et en même temps esclave.

Chasser les démons, n’est-ce pas alors contribuer à mettre l’homme debout, à faire advenir la vérité de l’être ; à permettre de vivre digne, autonome, libre, et cela en agissant au niveau personnel : aider à faire la vérité en soi, donner consistance, permettre de prendre des décisions librement et de reconnaître ses .dynamismes, ses limites, son péché.
Et en agissant au niveau structurel aussi : travailler pour instaurer plus de justice, de paix, de partage entre les hommes, les sociétés, dans les domaines culturels, économiques et politiques.

Ce pouvoir de chasser les démons n’est en rien une supériorité, c’est une autorité reçue du Christ, c’est un don et sa source est dans cet "être-avec Lui". C’est donc à son contact devenir peu à peu "contagieux de santé" pour les autres, dans cette juste articulation du cœur, de l’intelligence, de l’affectivité, de la volonté...

Etre chrétien, c’est donc faire partie de cette communauté des Douze, Peuple d’Israël nouveau, dans une démarche de liberté où l’initiative du Christ ressuscité est première et appelle... Faire partie de cette communauté pour être avec lui, Jésus-Christ, et en même temps pour être envoyé annoncer la Parole et chasser les démons.

Il y a à tenir ces trois dimensions qui sont d’ailleurs au cœur de la vie sacramentelle de l’Eglise : par le Baptême, tout chrétien est plongé en Jésus-Christ, dans sa mort et sa résurrection, et en même temps il est comme plongé dans une communauté chrétienne pour le service du monde.
La vocation baptismale se précise pour les uns et les autres par des appels particuliers.

Mais si certains, dans l’Eglise, reçoivent la responsabilité d’accompagner d’autres frères et sœurs, le but de cet accompagnement sera toujours de permettre et de favoriser cette articulation, quelle qu’en soit la forme concrète.

II - DIMENSIONS HUMAINES ET SPIRITUELLES

Il me semble que cette première partie peut donner un fondement à quelques réflexions plus pastorales et concrètes sur les dimensions humaines et spirituelles de l’accompagnement.

En distinguant, pour en parler, ces deux points, il importe de sentir à quel point ils sont en corrélation ; dans l’existence concrète des jeunes, comme dans la nôtre, l’humain et le spirituel sont indissociablement liés.

* L’ACCOMPAGNEMENT HUMAIN

Quelle que soit l’issue de la recherche des jeunes et S.D.V. et la forme précise de l’engagement qui pourra en découler, il s’agit de permettre aux jeunes de se construire humainement, d’être debout. Il me semble que les temps actuels invitent à porter plus d’attention à l’épaisseur humaine de ceux qui viennent nous trouver.

Accompagner, permettre et favoriser cette lente maturation de la personnalité, se fonde sur notre foi en l’Incarnation. La rencontre de Jésus-Christ est un dialogue de liberté. Dans l’Evangile la manière propre du Christ consiste toujours à donner corps, autonomie, possibilité de parler et d’exister devant lui. "Que veux-tu que je fasse pour toi ? - Que je voie !". Pouvoir habiter sa parole, exprimer son désir, et le laisser être travaillé au contact du Christ, découvrir par là sa propre vérité et oser exister avec ses faiblesses reconnues et ses forces de croissance... En un mot, être homme, femme, debout, tenant sa place..

Tout ce que l’accompagnateur peut faire pour mettre en place cette humanité est fondamentalement branché sur l’Evangile. Même s’il ne lui parle pas directement de Jésus-Christ, il ouvre des portes à une manière de vivre conforme à celle de Jésus-Christ.

Très concrètement, permettre à un jeune de parler de sa vie, lui donner la parole sur sa famille, son milieu, ses relations, ses activités, ses études..., et à travers cela ses projets et son désir, est important, que ce soit dans une rencontre personnelle ou de groupe.

A quoi l’accompagnateur va-t-il se rendre attentif dans ces dialogues :

- Quelle parole est possible, de la part du jeune, sur ces différents domaines (vie professionnelle, vie relationnelle et affective..) ?

En effet la parole met à distance

- Y a-t-il des aspects de son existence dont il ne parle jamais ?

- Comment le jeune se situe-t-il ? Lui est-il possible d’approuver et de remettre en question ce qu’il entend et voit ?

L’approbation béate, comme la critique systématique sont l’indice d’une dépendance et d’un manque d’autonomie qu’il y aura à faire remarquer peu à peu et à travailler

- Une difficulté présente dans un domaine se retrouve-t-elle dans les autres ?

Si c’est le cas, aider à nommer la résistance et chercher ensemble comment la travailler est une aide précieuse

- Dans son existence quotidienne, y a-t-il continuité ou papillonnage ? Est-il capable de prendre et d’assumer de petites décisions ? (se séparer de sa famille et prendre une chambre, durer dans un engagement . . )
Est-il capable d’évoluer, de s’adapter ? de collaborer et de travailler en équipe aussi ?

- Comment structure-t-il sa vie en fonction de valeurs, même au risque d’être désapprouvé ?
A quoi tient-il et qu’est-ce qui compte dans son existence ? Quelles sont les expériences qui l’ont fait grandir, progresser ? En quoi et pourquoi ?

- Quel intérêt, quelle ouverture porte-t-il aux questions du monde ? ou d’abord, très modestement, à la vie locale ?
Par delà l’information passive, quel est son souci de la justice et à quoi est-il prêt à s’engager ?

- Comment vit-il avec et dans son corps ? Le rythme de vie, la détente, le temps du sommeil, la manière de se nourrir...

Comment donner à sentir que ces multiples dimensions de l’existence - il y en a d’autres encore - méritent d’être regardées de près, car tout fait système ?

Le rôle de l’accompagnateur, qui permet au jeune d’unifier et de relire les différents aspects de sa vie, est vraiment capital aujourd’hui, vu la personnalité éclatée des jeunes. Ce travail est directement de l’ordre de l’annonce de l’Evangile ; c’est en consonance avec cette mission qui nous est confiée de chasser les démons : rendre autonome, libérer de ce qui aliène, permettre d’habiter ses propres ressources et dynamismes...

C’est déjà ouvrir à la possibilité de rencontrer le Christ.

* L’EXPERIENCE SPIRITUELLE

Comme chrétien, nous croyons que tout progrès dans la structuration intérieure, dans l’affermissement de la personnalité, est déjà l’œuvre de l’Esprit. L’expérience spirituelle et la vie spirituelle ne sont donc pas à part, en l’air, au-dessus, à côté... de cet enracinement humain. C’est la vie concrète de tous les jours, vécue selon l’Esprit du Christ ressuscité.

Il s’agira donc de faire découvrir la personne de Jésus-Christ, pour que croisse la relation personnelle avec lui. C’est le but de l’accompagnement de l’expérience spirituelle.

L’enquête montre que les jeunes ont une grande soif de Dieu, du sacré, et cela nous pose parfois question. En effet, Dieu peut être le lieu de toutes les projections parce qu’il est insaisissable, inaccessible, au-delà de tout. Cette expérience du sacré, du transcendant, très forte et intense parfois, peut aussi être une expérience très narcissique de soi-même, ou une recherche de l’image idéale de soi.

Plutôt que de regarder l’ambiguïté que ce désir de Dieu peut contenir - ambiguïté réelle - il me semble que le seul chemin de purification possible est de mettre les jeunes au contact de la personne de Jésus-Christ. C’est lui qui peu à peu, à son rythme, fait la vérité ; et ce n’est qu’en passant par lui que nous découvrons le Dieu de Jésus-Christ, Dieu Père qui fait de nous ses enfants, et que nous devenons fils et filles du Père, frères et sœurs les uns des autres, membres du même Corps pour le service des hommes et des femmes de notre temps. C’est cela l’expérience spirituelle. Dans la vie de tous les jours, suis-je esclave ou fils, fille du Père ?

Comment favoriser cette rencontre avec Jésus-Christ ? La Parole de Dieu est le chemin privilégié et plus particulièrement la parole telle qu’elle se donne dans l’Evangile. Regarder vivre, agir, parler le Christ de l’Evangile. C’est tout l’enjeu de l’éducation de la prière. C’est ce dont je vais dire un mot, sentant bien que cela ne recouvre pas toute l’expérience spirituelle.

Comme le mot "Dieu", le mot "prière" peut recouvrir des réalités très différentes, des expériences multiples, avec des ambiguïtés. Prier c’est se laisser toucher par cette Parole et se laisser transformer par elle.

Evangéliser la prière par la découverte progressive de la personne de Jésus-Christ à travers des textes qui le révèle, et être attentif à ce qui touche le jeune, à ce qui lui parle dans ces textes, et à la manière dont il est touché.

Certes, il y a des chemins divers, portés par nos traditions spirituelles, pour éduquer à la prière. Mais n’y a-t-il pas quelques lignes de force au cœur de ces diversités, pour aider à structurer une vie de prière et la faire évoluer dans une pédagogie progressive ? Partir de là où en est le jeune : qu’est-ce qui est prière pour lui ? et peu à peu susciter le goût de la prière, non pas seulement l’envie de prier, mais un goût qui s’affine.

* Mettre en place un cadre.
Proposer au jeune qu’il se fixe un temps, un lieu pour la prière et vérifier avec lui comment il est fidèle au cadre qu’il s’est fixé. Se joue là la capacité de prendre de petites décisions et de s’y tenir dans la durée ; c’est très structurant et simple à mettre en place.

* Donner à choisir ou proposer des textes précis, suivant l’année liturgique ou le chemin qu’on sent se décider.
Textes de l’Ancienne ou de la Nouvelle Alliance qui donnent à contempler l’une ou l’autre grande figure de l’Ancien Testament et leur accomplissement en la personne de Jésus-Christ.

* Que le jeune puisse repérer, noter ce qu’il a goûté dans ce texte et ce que cela a fait naître en lui : paix, trouble, angoisse, courage, désir d’aller de l’avant.
Pouvoir relire sa prière et pointer ainsi ce que l’Esprit a donné de savourer et les effets que cela produit en soi permet de repérer peu à peu son chemin, sa vocation personnelle.

* Apprendre à relire ce qui s’est passé dans la prière.
C’est un service ecclésial vraiment très important de permettre à un jeune de s’y retrouver peu à peu dans ce qu’il vit avec le Dieu de Jésus-Christ : lui donner de trouver quelques mots ajustés pour dire ce qui s’y passe.

L’attitude de l’accompagnateur est d’abord d’écouter avec discrétion le travail de l’Esprit chez l’autre. Ecouter sans projeter ses propres désirs sur ce que devrait découvrir ou éprouver l’autre. Ecole de détachement et de liberté. L’accompagnateur ne peut être que le témoin de cette Alliance qui se noue entre le jeune et Dieu. Il ne la provoque pas et n’interfère pas.

Dans cette écoute, il lui revient d’être attentif aux répercussions affectives, fruit de cette rencontre : Y a-t-il alternance entre des moments de goût intérieur et des moments de découragement ? ce qui est plutôt signe d’une relation qui se creuse. Ou, au contraire, les moments de prière ont-ils toujours la même tonalité : soit la louange, soit la déprime, soit des raisonnements plus qu’un impact affectif, ce qui pourrait être le signe de résistance à se laisser inviter par cette Alliance.

Enfin, il revient à l’accompagnateur de percevoir comment la prière embraye sur la vie concrète : Permet-elle une unification de la personne, un chemin de maturité ? Est-ce qu’il perçoit davantage sa vie comme un don et les projets qu’il forme comme reçus d’un Autre ? Est-ce qu’elle le rend passionné de la vie des hommes et des femmes d’aujourd’hui ?

La prière ouvre-t-elle à plus d’attention aux autres, quelle qu’en soit la forme ? Conduit-elle à une vie ecclésiale nourrie par les sacrements et enracinée dans une communauté chrétienne ?

Bref, il s’agit de sentir si le "être-avec-Jésus-Christ" de la prière est traversé par un "être envoyé" vers les autres, de l’intérieur d’une communauté ecclésiale. Il fit les Douze pour être avec lui et pour les envoyer".

III - L’ACCOMPAGNATEUR, UN HOMME DE FOI

Envoyés, nous le sommes nous aussi lorsque nous nous trouvons, ou que nous sommes mis sur le chemin de jeunes qui cherchent comment orienter leur vie. Cet envoi comporte une grâce, un don qui suppose en retour notre foi.

L’accompagnateur est un homme de foi. C’est sur cela que j’aimerais terminer. Un homme de foi, c’est-à-dire quelqu’un qui porte sur les jeunes, sur le monde, ce regard d’espérance et de foi puisé dans l’expérience du salut qui l’a lui-même transformé. A la manière du Christ sa lecture du réel révèle les forces de croissance qui habitent chacun et le monde qu’il sait pourtant marqué par le péché.

Un homme de foi qui donc s’en remet, dans une démarche confiante, au Maître de l’Histoire : aujourd’hui Dieu appelle et suscite des femmes et des hommes pour consacrer leur existence à son service. Aujourd’hui encore, le Christ ressuscité se donne à rencontrer dans la parole, l’Eucharistie, les plus pauvres, et cette rencontre transforme le cœur et ouvre à l’autre, au prochain et au différent. Aujourd’hui, l’Esprit de Dieu travaille le monde, agit, et "son souffle met à l’œuvre des énergies nouvelles".

Ce n’est pas nous qui faisons naître au cœur le désir de suivre le Christ, c’est son oeuvre, certes, parfois nos existences, nos paroles et nos gestes, un jour font signe, donnent envie et ouvrent un avenir.

Dans ces temps où les discours ne suffisent plus, il nous revient d’être ces témoins qui vivent et partagent ce qui est Bonne Nouvelle pour nous. La rencontre de Jésus-Christ, ce chemin de Vie découvert, qui s’est ouvert pour nous à sa suite, qui nous a mis debout, en marche, et nous permet de grandir. Un chemin qui est aussi un Exode, la sortie du pays de l’esclavage, le passage qui ouvre sur plus de liberté au cœur même de nous propres failles et limites, un chemin qui reste ouvert..., car il est encore à parcourir Nous ne sommes pas au bout et il est bon que les autres le perçoivent.

Plus qu’hier, parce que nous sommes tentés de déplorer le manque d’ouvriers pour la moisson, il importe de nous laisser travailler de l’intérieur par l’apparent décalage entre l’immensité de la mission et la pauvreté des moyens.

Cette alchimie intérieure, de l’ordre de la conversion, rend libre, inventif et audacieux parce que détachés. Elle permet à l’accompagnateur qui a éprouvé ses limites, ses conflits intérieurs et son péché, ainsi que ses propres dynamismes, d’aider en vérité les jeunes qu’il rencontre, à grandir.

Au fond, nous ne sommes que "les ambassadeurs du Christ", comme dit Paul, venant de sa part et renvoyant à Lui, par-delà toute volonté de puissance ou de main-mise. Ambassadeurs pour témoigner simplement d’une Vie qui nous traverse et nous dépasse. Témoigner avec assurance que tous, nous sommes aimés inconditionnellement.