Interventions conclusives


Père Michel COLONI,
évêque de Dijon, accompagnateur du Service des Vocations

Je retiens trois points de ces deux jours de travail intense vécus ensemble.

l/ Je repars de Vichy conscient d’avoir rencontré des S.D.V., équipes et responsables modestes. En quoi ?

Je ne sais pas si ce sont des SDV heureux, je le souhaite. En tout cas, j’ai entendu exprimer avec lucidité modeste, la conscience que vous avez de votre particularité de génération dans l’histoire de notre pays, dans l’histoire de notre Eglise. J’ai été frappé par une remarque entendue, vous situant par rapport aux plus jeunes et reconnaissant la différence par rapport à ceux qui vous ont précédés, ceci en toute paix et intelligence.

Il me semble que c’est à cause de cette lucidité modeste que vous vous êtes exprimés avec un tel respect à l’égard des jeunes que vous accueillez pour les accompagner. Confiance, respect, volonté de les prendre tels qu’ils sont, tels qu’ils ont été faits par les événements, l’histoire, leur place dans la suite des générations.

En cela, sachant que vous ne les rencontrez pas tous et que nous avons travaillé à partir des rencontres effectivement faite, il m’a semblé vous voir en situation d’éducateurs authentiques, c’est-à-dire désappropriés d’eux-mêmes. Ce qui n’est pas facile ni fréquent. Des éducateurs qui abordent leur tâche avec cet équilibre, comme en témoignent les remontées des ateliers.

Mais si j’ai rencontré des éducateurs, des S.D.V. modestes hantés par le souci d’une Eglise qui regarde positivement le monde et la génération qui suit, j’ai été étonné que cette préoccupation ait été ré-exprimée si souvent au cours de ces deux jours. Car il me semblait, mais je n’exprime qu’un point de vue personnel, que ce regard positif posé sur le monde où nous sommes était largement partagé. Ce n’est pas le cas, je le constate, à partir même de ce que vous avez dit et j’essaie de comprendre. Je me dis donc qu’un certain pessimisme chrétien que les générations précédentes ont connu, n’est pas encore maîtrisé et que la hantise que vous exprimiez signifie à tout le moins que nous devons prendre garde, en toute expression, à manifester que le monde est ce champ dans lequel Dieu travaille par son Esprit et que nous sommes appelés a collaborer avec lui.

2/ Des SDV modestes, mais un objectif envisagé, si vous le permettez, immodeste, écrasant. Etant donné les exigences qui ont été légitimement exprimées, manifestées, je me sens totalement incapable d’accompagner ! Il faut prévoir une formation rapide et une pédagogie de soutien ! Je crains de ne guère être capable d’être accompagné ! vous leur demandez beaucoup et j’ai été impressionné par l’ampleur de la tâche qui pèse sur vous et que vous reconnaissiez. Ce qui pose une question : cette tâche risque d’écraser nos équipes et chacun d’entre nous ? Pourquoi ?

Je pense que c’est parce que nous sommes sérieux et que nous avons travaillé sous le regard de Dieu et donc avec une exigence sans crainte, ce qui est bon. Néanmoins je me demande si cela ne tient pas aussi au fait qu’autrefois l’accompagnement des jeunes était réparti en une série d’instances, une série de partenaires allant d’une famille chrétienne à des aumôneries scolaires et étudiantes ou à des mouvements de jeunes ou à des rencontres paroissiales, et qu’aujourd’hui, pour un certain nombre de jeunes que nous rencontrons, vous sentez que, faute que des partenaires aient joué leur rôle, tout vous revient ? Cela interroge.

Peut-être convient-il de vérifier les partenariats indispensables pour que vous n’ayez pas tout à faire, voire de réévaluer la mission propre confiée aux SDV. Si on compte sur eux pour tout faire, cela demande peut-être à nous évêques, et je garde ceci en mémoire, que nous nous souvenions que toute initiative que nous prenons, que toute initiative que nous encourageons risque -si nous n’assumons pas notre rôle d’arbitre honnêtement et loyalement- de se transformer en rivalité pesante pour vous. Cela demande d’agir en responsable. Cela appelle peut-être une réflexion un peu plus longue sur l’histoire des SDV dans l’Eglise de France des dernières décennies, pour essayer de comprendre ces déplacements, ces transferts de responsabilités, voire ces excès, en fonction même de l’évolution de tout un contexte mondain et ecclésial.

3/ Je repars avec le sentiment d’un sujet précis que nous avions décidé d’aborder et qui a été exemplairement travaillé. Un sujet limité car nous n’avons pas tout dit de toutes les tâches qui nous sont confiées, et nous ne pouvons pas faire entrer sous la rubrique "accompagnement des 18-35 ans" l’ensemble de vos missions.
Je dirai même que l’insistance très intéressante mise sur l’accompagnement personnel nous a conduits à citer plus que traiter les compléments de cet accompagnement personnel. Je ne regrette absolument pas cette focalisation maximale sur ce sujet difficile et nous partons plus au fait, grâce à tous ces échanges. Mais il faut savoir que tout ceci est à re-situer dans un ensemble plus large.
Il m’est arrivé de participer à un certain nombre de rencontres organisées par le SNV, j’en suis toujours parti heureux, de celle-ci je pars très heureux.


Père Yvon BODIN

Au cours de cette session, à nouveau, une dynamique a joué, un souffle est passé. Nous ne nous sommes pas arrêtés à nos difficultés mais au contraire nous avons été encouragés à aller de l’avant.
Un souffle qui m’a amené à relire la conférence du Père Henri MADELIN, et j’ai pensé qu’il était bon, avant de nous quitter, de ré-entendre ensemble ce passage :

"Le mot ’accompagner’ signifie qu’il s’agit d’être pour les jeunes et avec eux un compagnon selon l’Evangile, c’est-à-dire un homme de conviction habité par le mystère trinitaire, sachant se mettre au service des autres, hanté par l’élargissement des frontières de l’Eglise, ouvert à qui vient, croyant au travail de l’Esprit dans le monde et l’Eglise. L’accompagnateur ne peut être un substitut du père ou de la mère, ni un grand frère, une grande sœur, mais un passeur, un premier de cordée, quelqu’un qui aide une liberté à grandir, un premier de cordée, celui qui fait sortir l’autre, selon la racine du mot".

Pour que ceci ne soit pas simplement une incantation, je vous informe que le SNV a pris l’initiative en concertation avec les Pères jésuites de Manrèse, à CLAMART, de programmer une session l’an prochain sur l’accompagnement des vocations. Cette session est prévue en deux exemplaires, pour permettre une meilleure participation : du 12 au 15 février, mais ceci vous sera redit par courrier, session animée par sœur Dominique Sadoux. Et une session, la même, du 5 au 8 mai animée par le Père Claude Digonnet.

Cette rencontre de VICHY, c’est peut-être son charisme, était le fruit d’un travail commun, c’est un travail national. Il est bien juste, avant de nous quitter, de vous restituer la part qui vous revient. Tel est maintenant le sens de notre merci à tous.