Les catéchistes, des éveilleurs


Yvon AYBRAM *

Vocation. En utilisant ce terme, nous sommes renvoyés à deux réalités : L’appel suppose quelqu’un pour l’émettre et quelqu’un qui en soit destinataire.
Lorsque des chrétiens parlent de vocation, ils expriment leur certitude que le Seigneur a un projet pour chacun d’entre eux, mais également la reconnaissance que ce projet ne prendra corps que dans la mesure où le destinataire donnera son accord. Autrement dit, nous sommes directement renvoyés à la lecture de la volonté divine et au comportement de celui qui accepte de le scruter.
Dans la vie chrétienne, appel de Dieu et réponse de l’homme sont intimement liés : c’est ce qu’on nomme la vocation.

LA CATECHESE AU SERVICE DES VOCATIONS

Elle fait
retentir la
Bonne Nouvelle

Il est impossible d’envisager la vocation s’il n’y a pas d’abord une parole qui retentisse aux oreilles d’un homme. Or, il se trouve que le terme "catéchiser" signifie très exactement "faire retentir" : le but de toute la catéchèse chrétienne, c’est que là Bonne Nouvelle de l’Evangile parvienne à rejoindre, avec vigueur, ceux à qui elle est destinée.
Par conséquent, dans les paroisses, les écoles et les aumôneries, la catéchèse ne peut être qu’au service des vocations. Autant il n’est pas du ressort des catéchistes de conseiller Celui qui appelle de façon à ce qu’il se fasse plus communiquant (!), autant il leur revient d’éduquer les enfants et les jeunes pour qu’ils apprennent à déchiffrer le langage que Dieu choisit de parler et que, ayant reconnu la voix du Maître, ils acceptent d’aller là ou Il veut.

Il ne semble donc pas qu’il soit absolument nécessaire de consacrer un ou plusieurs chapitres des "parcours catéchétiques" aux thèmes immédiatement liés à la vocation. Une double conviction devrait plutôt habiter chaque catéchiste :

a) Chacun de ceux gui lui sont confiés est appelé de manière originale à être l’une des "Pierres Vivantes" de la construction voulue par Dieu ;

b) il n’est pas insensé d’imaginer que les enfants en âge de suivre le catéchisme soient aptes à saisir, même confusément, cette invitation.

Dans une catéchèse tout entière orientée vers la découverte de la vocation, l’appel plus spécifique à la vie sacerdotale, ou à la consécration religieuse, pourra être reconnu et accueilli, et ce d’autant plus que la pratique montre que beaucoup de prêtres et de religieuses affirment que c’est précisément à l’âge où on fréquente le catéchisme qu’ils ont, pour la première fois, perçu des signes de leur vocation : l’enquête réalisée par Julien POTEL auprès de mille jeunes en formation religieuse ou sacerdotale, révèle que 40 % d’entre eux se sont sentis appelés avant l’âge de 12 ans, et deux tiers avant l’âge de 15 ans.

Elle fait entrer
dans le mystère
de l’Alliance

Les documents catéchétiques qui sont actuellement à notre service me paraissent largement favoriser ce genre de découverte : le recueil "Pierres Vivantes" en premier lieu, mais également la quasi-totalité des "parcours" insistent beaucoup sur le thème de l’Alliance, de cette relation d’amitié et d’amour dans laquelle Dieu appelle les hommes a entrer. Pour s’en convaincre qu’il suffise de se renvoyer, par exemple, à la page 10 de "Pierres Vivantes" : par le texte et par l’image nous sommes mis devant l’initiative divine qui attend la réponse de l’homme. En effet, nous avons en haut de la page le texte du premier chapitre de la Lettre aux Ephésiens ("Dieu nous a destinés à devenir pour Lui des fils par Jésus-Christ"), et en bas un gros plan du plafond de la Chapelle Sixtine où la main vigoureuse du Créateur se tend jusqu’à effleurer Adam, dans l’attente que ce dernier la saisisse.
Nous pouvons facilement, dans cette perspective, traverser l’ensemble du recueil, ou parcourir bien des documents catéchétiques. On ne peut parler de vocation sans évoquer la totalité des moyens que le Seigneur met à notre disposition pour nous révéler son projet : la catéchèse est du nombre !

A PARTIR d’UNE SESSION "VOCATIONS-CATECHESE" : DES CONVICTIONS

Tout cela a conduit le Service Diocésain des Vocations et le Service Diocésain de la Catéchèse à proposer, d’un commun accord, une session aux catéchistes.
Je reconnais avoir été surpris par le fait que, numériquement, la participation à cette activité ait été largement inférieure à ce que nous connaissons habituellement : la prospection est-elle mal faite, le libellé de l’invitation était-il insuffisamment apéritif... ? ou bien - et ce serait plus grave - cette préoccupation n’est-elle que peu présente à ceux (prêtres ou laïcs) qui sont en charge de la mission catéchétique ?

Il reste que la réflexion menée en commun nous a conduits à exprimer un certain nombre de convictions que je vous livre avec les questions qui en découlent.

POUR LES CATECHISTES

1 - Faisons tout d’abord la clarté pour nous-mêmes : voyons-nous bien qui est le prêtre, qui est le religieux, la religieuse dans la vie de l’Eglise.
Ces questions sont peut-être de celles que nous n’abordons jamais entre nous parce que, plus ou moins consciemment, nous estimons qu’elles sont déjà résolues dans un sens, ou dans un autre.

2 - Ne prenons pas notre parti de la diminution, voire de la disparition, des prêtres ou des religieuses.
Si nous croyons que le ministère est - par la volonté de Dieu - constitutif de son peuple, et que la vie religieuse est une grâce pour l’Eglise, il n’est pas possible d’imaginer ce peuple sans eux. Autre chose est de tenir compte de leur petit nombre, autre chose est de reconnaître tout à fait légitimement que les laïcs sont aussi responsables de la marche de l’Eglise. Cette réflexion touche à la nature même de l’Eglise et à sa sacramentalité.

3 - Ayant mission d’être de ceux qui font "retentir" la Parole de Dieu, il nous revient en particulier d’être des appelants,
c’est-à-dire de faire percevoir aux jeunes et aux enfants que Dieu invite toujours des hommes et des femmes à entrer dans ce type particulier de service.
C’est dans cette ligne qu’il paraît d’ailleurs important que nous osions, de temps en temps, être assez directs vis-à-vis de tel ou tel. Soyons des "éveilleurs de vocations".

4 - Restons vigilants et attentifs pour recueillir, et même faire résonner, une question, une attitude, une remarque d’un enfant, chaque fois que nous pensons qu’elle a rapport avec la vocation.

POUR LES ENFANTS

1 - L’histoire d’une vocation est en premier lieu l’histoire d’une expérience spirituelle. Dieu ne parle pas à l’extérieur de l’homme, mais au plus intime de son être.
La catéchèse a pour mission de permettre ou de favoriser une authentique spiritualité (cf. Texte de référence, n° 315).
Cette expérience ne peut être seulement extraordinaire, ponctuelle : l’animateur doit aider l’enfant à relire ces moments spécialement favorables, et à les relier les uns aux autres de façon à ce qu’ils prennent tout leur sens.

2 - Tout baptisé a une vocation : découvrir où le Seigneur appelle relève du déploiement du sacrement du baptême. Dire qu’une catéchèse doit être structurée sacramentellement (Texte de référence, n° 313), souligne qu’on ne peut réduire la démarche catéchétique à l’apprentissage d’un savoir : elle a pour tâche d’inviter chacun à entrer dans l’Alliance, personnellement.
Il est nécessaire d’apprendre à "écouter" Dieu avant d’envisager de Lui répondre (Texte de référence, n°2221).

3 - Dans l’Eglise, les vocations des uns et des autres sont diverses et complémentaires. Le "lieu catéchétique" cher aux évêques de France (texte de référence, n° 311) est cette communauté en train de se former où il est possible que chaque personne soit reconnue comme artisan de la vie ecclésiale dans un réel partage avec les autres.
Il faut donc que le temps du catéchisme soit mis à profit pour une exploration suggestive des divers Services qui font que l’Eglise est vraiment pour l’annonce de l’Evangile.
Personne n’est l’Eglise à lui seul, personne n’est inutile au Corps tout entier.

4 - Concrètement les enfants doivent rencontrer des prêtres, des religieux, des religieuses de manière à mieux comprendre qui ils sont :
Ils découvriront ainsi que cela vaut la peine de donner toute sa vie pour répondre au désir du Seigneur. Il faut permettre aux enfants d’aimer la place particulière de ces vocations.

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Cette recherche n’a été qu’une étape, sans doute bien modeste, mais elle montre qu’elle est possible sans engager des moyens considérables. Elle a été pour nous l’occasion d’une collaboration fructueuse avec le Service Diocésain des Vocations.

* Le Père Yvon AYBRAM est responsable du Service Diocésain de Catéchèse du diocèse de NANTERRE [ Retour au Texte ]