Mes souhaits d’évêque


Monseigneur Louis KUEHN *

Je ne sais pas s’il s’agit de souhaits, de désir ou de prière.
Je les transmets en tout cas aux forces vives du diocèse, tout spécialement à mes frères religieux.

l - QU’ILS NOUS AIDENT A NF PAS EVACUER LES VRAIES QUESTIONS DES HOMMES ET LES DEFIS DE NOTRE EPOQUE

Cf. Jean 12, 27. Certains traduisent la prière de Jésus : "Sauve-moi de cette heure". Xavier LEON-DUFOUR traduit : "Fais-moi passer sain et sauf à travers cette heure". Je suis toujours tenté de me situer au-dessus de l’Heure (au-dessus du lot), ou à côté (pour ne pas la prendre à bras-le-corps) ou en-dessous (écrasé par ce qui me tombe dessus).

Par leur état de vie, les religieux qui ont fait certains choix radicaux peuvent nous aider à retrouver l’essentiel sans nous évader de l’Heure qui est la nôtre.

C’est vrai, suivant nos charismes, au plan de la formation doctrinale (un religieux fait partie de notre instance diocésaine de formation), du ressourcement spirituel (apport des monastères ou autres communautés priantes), de I ’apprentissage d’une vie communautaire, de l’animation vraiment missionnaire des rassemblements, etc.

2 - QU’ILS AIDENT l’INSTITIJTION DE l’EGLISE à NE PAS REFUSER l’ACCIORNAMENT0 NECESSAIRE POUR ETRE PRESENTE A SON TEMPS

Je suis l’un de ceux qui ont mal réagi, je le confesse, à l’annonce du Synode extraordinaire. Rassurez-vous : je sais, dans la foi, que l’Esprit Saint peut heureusement nous surprendre ! Mais il me semble que notre Eglise n’a pas fini un certain temps d’Exode. Vingt ans, c’est court. L’exode du peuple d’Israël a duré 40 ans... Si un Synode n’est pas précédé d’un temps suffisant d’Exode, un certain "travail de deuil" n’est pas accompli..
0n regrette toujours les oignons d’Egypte et le veau d’or et les fausses sécurités.

La vie religieuse, à la fois instituée et charismatique, peut beaucoup nous aider dans ce sens. J’aime bien citer à mes frères religieux ce passage de Mutuae relationes :

"..Les profondes révolutions des situations, la croissance des valeurs humaines et les multiples nécessités du monde contemporain (G.S. 43-44) poussent de façon toujours plus forte au renouvellement de bien des activités pastorales traditionnelles et à la recherche de nouveaux modes de présence apostolique. Cette situation impose la nécessité d’une certaine diligence pastorale pour trouver de nouvelles expériences ecclésiales ingénieuses et courageuses, sous l’impulsion de l’Esprit Saint, créateur par essence. La nature charismatique de la vie religieuse s’accorde parfaitement avec une activité féconde d’invention et de réalisation (cf. n.12). C’est à bon droit que le Souverain Pontife Paul VI a affirmé : ’Grâce à leur Consécration religieuse, ils (les Religieux) sont par excellence volontaires et libres pour tout quitter et aller annoncer l’Evangile jusqu’aux confins du monde.
Ils sont entreprenants et leur apostolat est souvent marqué par une originalité, un génie qui font l’admiration’(E.N.69 )".

3 - QU’ILS PUISSENT ACCUEILLIR ET ACCOMPAGNER LES CHEMINEMENTS CATECHUMENAUX DE TOUTES SORTES.

Nous avons noté dans mon diocèse l’importance grandissante de l’accueil, l’accueil qui prend les gens comme ils sont sans les embrigader, l’accueil qui écoute et respecte, l’accueil qui donne un point d’appui pour aider le cheminement de l’autre lorsque c’est mûr.

Certaines communautés religieuses de mon diocèse jouent très bien ce rôle et aident les autres à mieux l’accomplir. Sans doute parce que des religieux ont l’expérience (douloureuse parfois !) de la vie communautaire, une certaine vigueur spirituelle, l’enracinement dans une tradition vivante, l’art de rendre réaliste telle ou telle utopie.

Nous avons aussi remarqué que les religieux sont souvent présents dans la mise en place (ou plutôt "la mise au monde") d’instances nouvelles avec la même capacité d’accueil et d’accompagnement.

Je pense, par exemple, à une équipe diocésaine ("Service pastoral rural") qui aide à la mise en route des paroisses rurales confiées à des laïcs.
De fait, des religieux et religieuses ont été à l’origine de cette initiative, ils y ont apporté d’emblée le respect du cheminement de chaque membre de l’équipe d’animation, le souci constant d’une vraie formation : ouverture au monde environnant, apprentissage évangélique de la vie fraternelle pour gérer les conflits, formation doctrinale à la mesure de chacun.

Telle est ma prière. Je vous remercie de m’avoir permis de la partager fraternellement avec vous.

* Ces"souhaits d’évêque" sont un extrait de l’intervention faite par Mgr. Louis KUEHN, évêque de MEAUX, à la Conférence des Supérieurs Majeurs de France en 1985 : avec l’amicale autorisation de Mgr KUEHN et du secrétaire général de la Conférence. [ Retour au Texte ]