Et je me suis mis en route...


François CLERET *

Les choses s’accéléraient quelque peu pour moi, en ce mois de Juin 1985. En même temps qu’on allait me confier la responsabilité du Service Diocésain des Vocations du MANS, on me pressait de me rendre à la session de FRANCHEVILLE.
Il m’a fallu, comme d’autres, bousculer un agenda et déplacer des rencontres. Et je me suis mis en route, non sans appréhensions... Elles sont bien vite tombées.

UN CLIMAT d’ESPERANCE

Ce qui m’a surpris d’emblée, c’est le climat qui a régné.
J’ai découvert une assemblée nombreuse : une centaine de participants heureux de se retrouver. Et moi qui craignais de ne connaître personne, je rencontrais des visages connus : Gérard, Georges, Thierry, Henri et quelques autres. Des liens nouveaux se sont tissés. La bonne humeur n’empêchait pas le sérieux du travail, loin de là, grâce à une animation de qualité, grâce surtout au désir de tous d’avancer sur la question de l’appel au ministère de prêtre diocésain. Et là encore, le climat m’a réjoui : ce ne fut pas l’angoisse ou la panique devant le petit nombre de candidats au sacerdoce, mais bien plutôt l’espérance car, comme l’a dit l’un d’entre nous "le Seigneur ne cesse d’appeler et il n’est pas possible de labourer ainsi une terre en profondeur sans qu’un jour elle ne se mette à porter du fruit".

OSER APPELER

Il n’était pas besoin de parler de l’espérance car elle fusait de tous les coins de France, à travers les initiatives multiples qui remontaient des diocèses : ici, une marche ou une veillée de prière ; là, un rassemblement autour d’une ordination ou dans une abbaye ; ailleurs un pèlerinage ou la création d’un Foyer pour des jeunes qui acceptent d’entendre la question...

Toutes ces initiatives me confirmaient dans la conviction que le Seigneur ne cesse pas aujourd’hui d’appeler des jeunes à le suivre, et qu’il nous revient de faire entendre cet appel auprès des jeunes.

Oser appeler, en sortant nous-mêmes de nos peurs ! car des jeunes portent cette question au fond d’eux-mêmes ; ils attendent une parole. Je l’ai vérifié cet été à Lourdes, avec les adolescents que j’accompagnais. Dans l’Evangile, Jésus n’attend pas que des disciples se proposent : il passe et il appelle : "Suis-moi". Et les disciples, à leur tour, en interpellent d’autres : "Viens et vois".

RESTITUER LE SOUCI DE l’APPEL A l’ENSEMBLE DU PEUPLE DE DIEU

Alors je pensais aux appels que nous pourrions adresser à des jeunes, aux initiatives que le Service Diocésain des Vocations, chez nous, pourrait lancer.
Mais en même temps la session de FRANCHEVILLE m’ouvrait des horizons nouveaux avec cette conviction que ni le S.D.V., ni les prêtres, ne sont propriétaires de "l’appel" mais qu’il faut en restituer le souci à l’ensemble du peuple de Dieu, parce que c’est l’Eglise d’abord qui a besoin de prêtres et parce que c’est lorsque des communautés sont vivantes qu’elles ont des chances de devenir des communautés appelantes.

Je repensais alors à mon propre diocèse. Bien sûr, il faut que le S.D.V. continue à susciter des initiatives, mais, en même temps, il nous faut travailler en lien avec les partenaires pastoraux, promouvoir des relais avec les prêtres souvent déconcertés ; avec les séminaristes en connivence avec les questions que se posent, aujourd’hui, les jeunes ; avec les secteurs pastoraux ; avec les Mouvements de jeunes et les aumôneries scolaires ; avec les Centres spirituels qui nous redisent l’importance qu’il y ait des hommes disponibles pour écouter et accompagner des jeunes ; avec le Service diocésain de la catéchèse...

Il y a beaucoup à imaginer et le champ est immense. Mais nous ne travaillons pas seuls. L’Esprit du Seigneur est là, qui anime son Eglise.

AU COEUR DE l’EGLISE, DES PRETRES CONFIGURES AU CHRIST, POUR LA MISSION

Nous touchons peut-être là ce qui se voit le moins, ce qu’on ne peut pas d’emblée traduire en décisions d’action, et pourtant, c’est sans doute ce qui m’a le plus marqué au cours de cette session.

Nous avons parlé du diocèse, autrement ; c’est-à-dire non pas d’abord comme s’il s’agissait d’un territoire à couvrir. Nous l’avons regardé comme un espace spirituel marqué par une histoire, où vivent aujourd’hui des hommes et des femmes avec leurs difficultés et leurs espoirs. C’est pour eux que nous sommes prêtres.

Et notre ministère, malgré nos diversités, ou ,justement à cause d’elles, nous ne pouvons pas l’exercer en nous isolant les uns des autres. J’ai senti combien le presbyterium devenait fraternité sacerdotale, communion vivante entre prêtres et leur évêque. Les prêtres les plus jeunes, dont je fais encore partie, beaucoup de séminaristes aussi, sont très sensibles à cet aspect-là. Comme ils sont proches de la manière dont nous avons souligné la double dimension du ministère du prêtre diocésain : celle de la mission et celle de la mystique. C’est vrai qu’on n’engage pas toute sa vie pour accomplir une tache, si noble soit-elle, si on ne se laisse pas saisir tout entier par Celui qu’on annonce.

C’est là où la passion de l’homme rejoint la passion du Christ. Tout ministère est expérience pascale... et eucharistie... pour que les hommes aient le Pain de la Vie.


"Que tes oeuvres sont belles,
Que tes oeuvres sont grandes
Seigneur, Seigneur,
Tu nous combles de joie !"

* Le Père François CLERE.T est responsable du S.D.V, du diocèse de LE MANS [ Retour au Texte ]