Un signe d’espérance : Francheville 85


Fernand BECRET *

"Le Seigneur a semé en moi une espérance qui ne passera plus" (N. Kluiters)

Je souhaite que ces paroles aient quelque résonance chez les participants de l’intense session de FRANCHEVILLE.

LE COURAGE DES RECOMMENCEMENTS

Devant les initiatives prises en France pour appeler au ministère de prêtre diocésain, on est étonné de leur nombre et de leur diversité. on admire l’intrépidité de ceux et celles qui recommencent contre vents et marées, leur oeuvre d’interpellation.
On pourrait être tenté de ne relever que la disproportion entre l’énergie dépensée et les résultats. Mais comment douter de la mystérieuse fécondité de cette "inébranlable ténacité" (C. Bouchaud) ? Qui dira la force d’entraînement de pareils gestes au milieu du Peuple de Dieu ? Ce courage des recommencements n’est-il pas la clef des semailles à la mode évangélique ?

LE MINISTERE PRESBYTERAL, UNE VOIE DE SAINTETE

J’ai beaucoup apprécié tout ce qui a été dit sur le ministère de prêtre diocésain comme chemin de sainteté.
D’abord en raison de l’actualité d’une telle approche. Les jeunes croyants asphyxiés par le vide spirituel de notre société, frustrés de mystère ont soif de Dieu, d’un Dieu exiqeant dont les traces transfigurent la vie. Ils ne sont guère tentés de suivre les dévoués, les super actifs. Ils ont besoin de mystiques. Les saints sont leurs maîtres.

Autre raison non moins importante. Si l’on veut se donner la peine de réfléchir et de regarder, il est bien vrai que l’existence sacerdotale offre les chances d’une profonde expérience spirituelle. Le sacrement de l’ordre invite à une configuration particulière à Jésus-Christ, Pasteur. Les prêtres sont ordonnés à se dessaisir d’eux-mêmes pour être à Dieu et à leur Peuple. La charité pastorale qui unifie leur vie spirituelle est "passion des hommes par passion du Christ" (Y. Bodin). Et de fait, qu’est-ce que le coeur d’un prêtre sinon ce visage intérieur de miséricorde buriné au fil des rencontres, sinon cette attitude pascale du "donner sa vie pour..." éminemment sanctifiante.

A n’en pas douter, le langage des fonctions, le poids des tâches avaient oblitéré ces dernières années la dimension mystique de la vie de prêtre. Il est temps de replacer l’appel à la sainteté au centre du ministère presbytéral. Il est temps de réaffirmer la richesse théologale d’une existence qui n’a d’autre lieu que l’agir du Christ : "servir et donner sa vie en rançon pour la multitude" (Mt 20, 28).

Certes la sainteté sacerdotale n’est pas un idéal abstrait. Il lui faut un contexte, des conditions pour s’incarner. Mais ce n’est pas le moindres des mérites de la session de nous ré-interroger sur ce point avec acuité.

UN ECHANGE QUI RESTERA UN MOMENT DE GRACE

A FRANCHEVILLE, cent prêtres étaient réunis entre eux. Il n’en fallait pas davantage pour qu’un certain refrain me revienne aux oreilles : Dans l’aujourd’hui de l’Église, une telle assemblée cléricale n’est-elle pas anachronique ? Ne constitue-t-elle pas une sorte de reprise en mains des prêtres ? Religieux laïc, je m’inscris en faux contre cette vision des choses.

La session ne se voulait pas une assemblée du peuple de Dieu mais un rassemblement de prêtres responsables. Il est bon, il est nécessaire qu’à certaines occasions les prêtres puissent se réunir et partager sur leur vie (et pas seulement sur l’organisation de la pastorale). A FRANCHEVILLE, nous avions fait le pari d’un retour au coeur. Certes, l’objectif était clairement apostolique : appeler au ministère de prêtres. Mais nous avions voulu revenir à la source par un long échange en petit groupe : prêtre, qu’est-ce qui m’appelle aujourd’hui ? Qu’est-ce qui me fait vivre ? Qui m’appelle ? Et ça a été "quelque chose de rare..., un échange qui restera un moment de grâce".

Les prêtres n’ont pas à être les parents pauvres de la pastorale. Je suis persuadé de l’importance pour eux - comme pour l’ensemble des baptisés - d’une lecture de la présence de Dieu en leur vie. Je me réjouis de ce qui a été vécu à FRANCHEVILLE et espère que ce sera la matrice d’autres expériences semblables.

 

Au terme de la session, on peut se demander si le but a bien été atteint, si l’on a assez débroussaillé ce qui a à être aujourd’hui une concertation ecclésiale de l’appel au ministère de prêtre. Une chose me semble certaine : FRANCHEVILLE a nourri notre espérance.

* Le Frère Fernand BECRET est Frère des Ecoles Chrétiennes et, jusqu’à cette session membre de l’équipe du S.N.V. [ Retour au Texte ]