En quoi c’est important pour vous qu’il y ait des prêtres diocésains ?


* Pères Gilles FRANCOIS
Marc LULLE
Michel de TRUCHIS

Réfléchissant à cette question, notre première réaction à nous, trois jeunes prêtres de la Région parisienne, fut de dire qu’il n’est pas prioritaire d’appeler des jeunes au ministère diocésain. La priorité, c’est que chacun découvre Jésus-Christ et son appel personnel. La priorité, c’est que chacun trouve sa manière d’être chrétien. Etre prêtre diocésain en est une, parmi d’autres. C’est la nôtre.
Pour nous, les prêtres diocésains sont des hommes envoyés à un peuple précis, des hommes au carrefour de multiples réalités.
La diversité du ministère du prêtre diocésain consonne bien avec nos points de départ personnels : la passion des hommes, l’ouverture au monde, le goût des contacts et des rencontres.

ENVOYES A UN PEUPLE PRECIS

Envoyés à un peuple précis, nous avons chacun notre histoire à ce sujet :

  • c’est l’expérience d’insertions en des villes et communautés chrétiennes différentes, notamment à travers la formation au ministère, qui a donné à Marc et à Gilles le recul et la conscience d’être de Nogent s/Marne ou de Saint Maur,
  • c’est une insertion dans le 9ème arrondissement de Paris qui a amené Michel à se sentir pour la première fois d’un quartier.

Aujourd’hui, nous voilà envoyés avec des prêtres et des laïcs à un peuple précis, à Champigny-Joinville, à Nogent, à Saint-Mandé, dans des Eglises locales qui deviennent nos communautés.
Ces enracinements locaux sont aussi enrichis de nos expériences personnelles : nos amis, nos familles sont dispersés aux quatre coins de la Région parisienne et de la France, voire plus loin ! Nous sommes pétris par une vie sociale qui ne connaît pas de frontières municipales ou départementales, et donc paroissiales ou diocésaines. Aujourd’hui, nos relations comme celles de beaucoup en ville, se font selon d’autres réseaux et d’autres frontières que géographiques.

UNE VIE AUX CARREFOURS

Dans ces conditions, être envoyé dans une ville, c’est être envoyé à des carrefours où se croisent des réalités humaines diverses : géographiques, professionnelles, associatives... Là, nous sommes appelés à être présence du Christ qui rassemble et abat les frontières entre les hommes.

Notre vie de prêtre y prend une dimension fondamentalement contemplative : nous devenons, à ces carrefours, témoins de ce que vivent les hommes de notre temps et signes d’une bonne nouvelle accueillie et vécue aujourd’hui. Nous vivons et découvrons chacun différents aspects de cette vie. Voici quelques expressions tirées d’un dialogue que nous avons eu avant la rédaction de ces quelques lignes :

"Ma communauté, c’est l’Eglise locale où je cherche avec les chrétiens comment témoigner ensemble de l’Evangile. Au départ, je pensais être le témoin privilégié du Christ dans la communauté chrétienne. Aujourd’hui, je me rends compte que les hommes, les femmes, les enfants que je rencontre me rendent témoin de tout ce qu’ils vivent et m’appellent à y reconnaître l’Esprit à l’oeuvre."

"On est aussi parfois seul face au désert. Ainsi, après l’enterrement d’un jeune de 27 ans, sa famille, ses amis m’ont invité à venir voir des photos de lui. Croyants et non pratiquants, ou incroyants, ils ont exprimé leur contentieux avec l’Eglise au cours d’un échange passionné sur la mort. Je ne savais que dire, quels mots employer. Ce sont des moments où l’on se demande ce qu’on fait, quelle est notre place, pour quelle suite." °

- "Ma vie de prêtre me plaît. J’y retrouve deux dimensions de l’Evangile qui me passionnent : celle de la route avec le Christ ; celle de la contemplation, de la demeure, comme dit St Jean."

"Ma vie de prêtre, c’est beaucoup de contacts, des rencontres, certaines très ponctuelles, d’autres durables. J’y trouve de nombreux appels à la fidélité, même avec des gens que je n’ai pas choisis. Il y a là un plaisir et une lutte qui me dynamisent. Je l’ai expérimenté à travers toutes ces rencontres et j’ai été témoin que c’était une possibilité de renaissance et de renouvellement. Bref, une espérance.

Cette vie aux " carrefours " s’accorde aussi avec mon goût pour la solitude. J’aime me retirer et je vis plutôt bien ce passage entre des temps de rencontre et des temps de retrait. Il y a là pour moi une expression et une prière possible quand je laisse l’activité et ma propre volonté de bâtir, pour respirer à mon rythme dans la solitude."

Ces expression sont pour nous le signe que ce sont les chrétiens qui nous font prêtres au jour le jour, notre ministère n’a donc de sens que dans cette réciprocité avec le peuple de Dieu en marche. C’est tous ensemble, prêtres et laïcs, que nous sommes responsables de l’Evangile là où nous vivons. Notre place de prêtres diocésains dans l’Eglise est de repérer et de recueillir jusque dans les racines de la vie des hommes et de la foi des hommes, la vie de Dieu, le dynamisme de l’Esprit.

Notre présence locale sert souvent à catalyser ce dynamisme, à mettre en lien, à faire vivre ce qui est déjà en germe. Voilà en quoi nous sommes serviteurs.

* * *

Beaucoup d’espérance germe quand nous acceptons d’être par ces contacts à la fois très riches et très pauvres. De l’intervention ponctuelle au lien le plus durable, du labour dans la nuit à la moisson, les chemins se croisent, qui nous font dire l’importance de la place des prêtres diocésains dans l’Eglise : Si nous sommes au Christ, c’est parce que nous avons entendu au coeur d’un peuple son appel. L’Eglise nous a fait reconnaître le Christ vivant. Elle nous a permis de répondre à la vocation de notre baptême et c’est cette Eglise qui nous fait prêtres aujourd’hui.

* Les Pères FRANCOIS, LULLE et de TRUCHIS sont tous les trois prêtres dans le diocèse de CRETEIL. [ Retour au Texte ]