Réflexions d’un participant à la session de Francheville


Jean-Marie AMIOT *

"Mieux assurer notre ministère de pasteur par une meilleure connaissance de la vie religieuse apostolique", tel était un des objectifs de cette session de Francheville

Il me semble, pour le néophyte que je suis, que cet objectif est atteint. La qualité de la préparation et des intervenants, la densité de cette assemblée ecclésiale soucieuse de servir, le climat de prière humble et soutenue, les retombées de l’Assemblée de Lourdes, la fréquentation de documents récents et majeurs, nous ont aidés à approfondir notre perception de la vie religieuse apostolique et, aussi, à faire quelques découvertes.

De tout cet ensemble, quelques traits me semblent marquants : ’

I - L’ETONNANTE EVOLUTION DE LA VIE RELIGIEUSE APOSTOLIQUE,

dans cette période de mutation de civilisation.

A un moment où les sujets d’inquiétude ne manquent pas, ce que j’ai entendu témoigne d’une grande vitalité.

II - LA PRISE AU SERIEUX PAR l’EGLISE, DE LA VIE RELIGIEUSE EN GENERAL

Je n’en doutais pas, mais c’est une sérieuse confirmation :

"La présence de la vie religieuse est vitale. Elle est tellement enracinée dans l’Eglise que si elle n’est pas..., si elle n’est pas avec, l’Eglise en serait secouée, sa vie, sa sainteté seraient compromises".

Plusieurs aspects de cette session confirment cette attention :

- La session de FRANCHEVILLE elle-même et sa centaine de participants.

- Les travaux de l’Assemblée des évêques 1983, à Lourdes, et le travail d’approfondissement qui suit.

- La place accordée à la vie religieuse par le Nouveau Code de Droit Canon.

- Là, plus qu’ailleurs, semble-t-il, abondent les courts principes théologiques et spirituels. Les Canons précisent, protègent même, l’originalité, la spécificité, la diversité de la vie religieuse. Le principe de subsidiarité joue à plein ; des sphères d’autonomie sont précisées ainsi que les passerelles, favorisant une Eglise-communion.

III - L’AMPLEUR DU TRAVAIL d’AGGIORNAMENTO,

manifestant une grande confiance en l’Esprit Saint, en l’Eglise, en l’Homme.

Trois points me semblent particulièrement importants :

- Les relations nouvelles vécues dans les diocèses avec les évêques, prêtres, laïcs et avec les différents conseils qui se mettent en place (C.D.R., divers, conseils paroissiaux, conseils pastoraux...). "Mutuae relationes" si nécessaires et féconds dans une Eglise-communion et sacrement de salut.

- L’approfondissement de la théologie de la vie religieuse participant de façon originale à la mission de salut de l’Eglise. Je perçois mieux à travers l’exposé de Dom LOUF, par exemple, la connivence profonde entre la vie religieuse contemplative et apostolique et l’ensemble du peuple de Dieu, appelé à la sainteté et à la plénitude de la charité, dans cette plongée existentielle dans un désert fécond, dans une vie guidée par l’Esprit de Jésus mort et ressuscité.
J’ai davantage découvert les jalons d’une théologie de la vie religieuse apostolique qui précise son originalité, non plus en se contre distinguant de la vie religieuse monastique, mais positivement : Une vie religieuse apostolique dont l’action apostolique fait partie de sa nature même.

- L’importance de boire à la source de la vie religieuse. Cette urgence m’a parue majeure en écoutant un intervenant qui regardait avec nous l’histoire de la vie religieuse en particulier au cours du XIIème siècle, en Europe.
A l’origine de la vie religieuse apostolique n’est pas d’abord le désir de répondre généreusement à des besoins sociaux, utilitaires, (j’ajouterais aujourd’hui "pastoraux"), mais un autre regard : le désir d’imiter le Christ et le pauvre. Oui, il s’agit d’une autre vision : des personnes ont été portées dans un seul et même mouvement vers le Christ et vers les hommes. Deux amours devenant UN. Il y a là une expérience spirituelle qui va au-delà d’un simple regard général de foi. Il s’agit d’une profonde expérience spirituelle de Dieu en même temps, inséparablement, qu’un contact avec le monde.
La vie religieuse apostolique apparaît plus nettement comme signifiant visiblement l’absolu de Dieu et un certain rapport au monde.

IV - LA NECESSITE POUR l’ENSEMBLE DU PEUPLE DE DIEU d’UNE MEILLEURE CONNAISSANCE DE LA VIE RELIGIEUSE APOSTOLIQUE

Et tout d’abord pour les prêtres (et pourquoi pas dès la formation au grand séminaire) : que nous puissions nous ouvrir davantage à ce cadeau qu’est la vie religieuse apostolique pour l’Eglise dans le monde ; qu’en cheminant avec telle ou telle communauté concrète, nous puissions apprécier et respecter davantage les charismes propres, et travailler ensemble.
Pour l’ensemble des laïcs, aussi, qui apprécient "les services" rendus par tant de religieux et religieuses, mais ne sentent pas toujours l’originalité et la place de la vie religieuse dans la vie ecclésiale.

V - LE SOUCI QU’UNE PLACE PLUS GRANDE SOIT ACCORDEE A l’EVEIL ET A l’ACCOMPAGNEMENT DE JEUNES A LA VIE RELIGIEUSE, en liaison avec les Services Diocésains des Vocations. (faut-il rappeler qu’en France, près de 35 000 religieuses ont plus de 65 ans ?). -
Deux souhaits aussi, en fin de session : Qu’une place soit accordée, dans une prochaine rencontre, à un témoin des Instituts séculiers. Dans la recherche qui se poursuit, une collaboration peut être féconde entre ces hommes et ces femmes vivant "dans le monde et à partir de lui", en "oeuvrant de l’intérieur", et d’autres dans des communautés apostoliques de vie religieuse.
Peut-être aussi serait-il bon d’écouter également les découvertes des nouvelles communautés religieuses qui naissent sous nos yeux. N’est-on pas à l’époque des créations ?
Voilà une session qui ne m’a pas laissé indifférent avec ce désir non seulement de connaître davantage la vie religieuse, mais aussi de servir différemment, avec d’autres, la vie religieuse apostolique.
Et puis, le radicalisme évangélique est toujours interpellant.

* Le Père Jean-Marie AMIOT est responsable du Foyer-séminaire St François de Nancy [ Retour au Texte ]