Eucharistie, Incroyance et Foi


L’incroyant, Dieu nous parle aussi par lui, puisqu’il existe, simplement.
Quand il s’agit d’Eucharistie que peut nous suggérer la présence de l’incroyant ?

Le Père Jacques SOMMET, du Secrétariat "Incroyance et Foi" nous a livré quelques réflexions. Le texte suivant s’en inspire.

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Parler d’Eucharistie en rapport avec l’incroyance et la foi, ce n’est pas d’abord parler de la messe mais du mystère de l’Eucharistie vécu dans la relation du croyant, de la communauté chrétienne, avec l’incroyant, celui qui se dit tel, qu’il refuse le dialogue ou qu’il le recherche. Dans les deux cas, cet homme ne peut nous être indifférent : Dieu nous parle aussi par lui, puisqu’il existe, simplement.

Quel rapport y a-t-il donc entre l’Eucharistie et l’incroyant ?
Le mystère de l’Eucharistie nous est révélé, dans le temps, par des gestes. A son tour, elle nous révèle l’essentiel de la vie chrétienne comme histoire. Elle est elle-même révélante. Cette double révélation comporte :

- l’institution de la Cène et le Discours qui l’a suivie,

- le mystère de la Passion et de la mort de Jésus-Christ.
Le mystère de l’Eucharistie s’y révèle avec les traits suivants :

1) La Cène est un acte social : elle institue des gestes communautaires autour du pain et par des paroles.
Le pain, réalité humaine, élément concret de la vie humaine. Il devient chemin nécessaire du don de Dieu aux hommes en son Fils. Il signifie ce don.

Il nous signifie que partout où nous rencontrons l’homme vivant et travaillant, le mystère de Dieu qui se donne aux hommes peut être institué et vécu.

Les paroles qui l’accompagnent signifient que cette existence humaine du Christ est DONNEE aux hommes, par ce pain, et LIBREMENT livrée jusqu’à la mort, avant même que cette mort soit subie, que son processus soit engagé (l’arrestation n’est pas encore intervenue).

Cela signifie que, pour nous, TOUTE EXISTENCE HUMAINE, avant même que la foi en Dieu - quelle qu’elle soit - ne s’y soit manifestée, est visée par le don de Dieu en Jésus-Christ.

Donc toute incroyance, même celle qui refuse le dialogue, est le lieu possible d’un DON LIBRE de Dieu à l’existence humaine qui s’exprime en refus.
Amour inconditionné, clairement, librement exprimé de Dieu pour TOUT homme.

2) La Passion n’est plus le lieu des paroles mais de la réalisation, réalisation du don à travers cela même que les hommes font de Jésus-Christ - jusqu’à la mort - en le refusant. C’est aussi la manifestation que l’homme, en pratique de mal et de destruction, ne peut échapper à l’amour, cet amour qu’il met en voie de réalisation par son excès de mort.

Cela signifie que nous ne pouvons nous passer, nous chrétiens, de ceux qui représentent l’incroyance militante la plus forcenée. Elle est le lieu du pardon créateur.

Après ces brèves réflexions sur la place de l’incroyant, de l’incroyance "militante", il faudrait aussi parler de la relation de l’Eucharistie avec l’incroyance de recherche. Nous pensons à l’Eucharistie en sa première étape, telle que nous la livre directement l’Evangile.

Une lecture de la Passion et de ce qui la prépare nous montre ce que sont les moins croyants, dès les origines. Et cela peut nous éclairer :
ainsi le bon larron, le centurion, etc. Dans tous ces cas il faut au moins insister sur l’impact très fort qu’a pu avoir le DON CHRETIEN manifesté JUSQU’A LA MORT, sur les hommes en recherche de foi...

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Tout cela a trait non pas d’abord à la messe mais à l’Eucharistie révélation de son propre Mystère. C’est dans la mesure où tout cela est vécu dans le quotidien, par fidélité à la Cène et à la Passion, que l’incroyant se trouve à la fois respecté et invité, d’une invitation indubitable, la moins "intéressée", la plus apostolique.

Alors la dualité entre Parole de la Promesse (Cène) et réalisation de l’Amour (Passion) n’est pas dangereuse. Elle est assumée dans l’unité d’un Amour créateur.

d’après Jacques SOMMET, s.j.