Un homme de l’avenir


Un aumônier de lycée réfléchit sur son expérience et se demande ce qui peut séduire des jeunes dans l’image qu’ils se font du prêtre et leur permettre de formuler un projet sacerdotal.

La naissance d’une vocation dans un lycée me paraît très liée au style de communauté et d’activités qui s’est établi en liaison avec la personne du prêtre. C’est à travers cet "univers en action" que le jeune voit vivre ce prêtre. C’est là qu’il peut juger de’1 ’utilité" de sa fonction. Quand un garçon m’a dit : "le boulot que vous faite est quand même formidable", il y a pour lui une possibilité d’attirance du "métier". Actuellement, je crois que cet élément est capital.

Comment est-il saisi (pour ceux que je connais) ? Comme une fonction de rassemblement d’un peuple, formé d’éléments plus divers que ceux de la classe ou du cercle d’amis, dont certains sont assez dynamiques pour faire penser que ce Peuple est en marche, qu’il "a un avenir". Voilà pourquoi il m’a toujours paru bon de mettre les gars du 2e cycle en contact avec des Prépas, des Grandes Ecoles (certains diront des parents, et sans doute aujourd’hui est-ce plus nécessaire). Dans cette marche si souvent ralentie ou bloquée, si le prêtre est celui qui relance un peu prophétiquement la communauté, alors il paraîtra lui aussi comme un homme de l’avenir, remettant le premier en question une société qui cesse de s’ouvrir à la VIE. Qu’il n’apparaisse pas toujours comme l’homme qui défend une "structure".

Au moment où certains jeunes sont exceptionnellement polarisés sur l’engagement politique (minorité mais très marquée par l’idée de vocation), dans lequel ils voient une "promesse" de transformation efficace de la société et des rapports humains, il me paraît difficile de voir naître des vocations si le prêtre n’apparaît pas comme celui qui permet aujourd’hui une transformation effective des rapports humains. Comment ? En étant le "lieu" de cristallisation des efforts que les jeunes font pour réussir cette "reconnaissance de l’homme par l’homme", qui est le point oméga de toute vie politique. S’il n’est que le centre d’un groupe parmi d’autres, il risque de n’éveiller que des vocations ambiguës ou fragiles pour l’avenir.

Homme de la parole, le prêtre ne doit plus, à mon avis, apparaître seulement comme celui qui. prêche bien, mais celui qui dans un groupe permet une certaine libération et communion de la parole. C’est dans la mesure où il est celui par qui se réalise et s’effectue cette communion, que sa fonction eucharistique sera saisie comme centrale non seulement pour l’Eglise mais pour tous les hommes. Il sera alors plus facile de présenter la vocation sacerdotale comme étant "au coeur" du monde qui cherche si fort la communication.

Aujourd’hui, il faudrait peut-être ajouter que les jeunes seront sensibles à l’homme de l’Espérance.

A quelles occasions sont nées les vocations que j’ai connues ? Difficile, car rien n’est probant. Pour moi, et dans le passé, ce sont les récos, les retraites, les méditations d’équipes, les responsabilités assumées (équipes J.E.C.)... Mais aucune de ces vocations n’a été durable sans un certain dialogue pastoral (cf. conseil spirituel), au long de plusieurs années (dix ans parfois). C’est en apprenant à un jeune à lire sa vie, à choisir par lui-même, à être fidèle à ce qu’il y a de meilleur en lui, etc. qu’il a des chances de répondre aux réels appels du Christ.