Édito


Les Assises 2010 s’inscrivent dans une histoire et un continuum. Un an après les JMJ de Paris, en 1998, la première rencontre se déroulait à Francheville sur le thème « Corps et foi ». En l’an 2000, la seconde avait lieu à Valpré avec ces deux questions : « Qui sont les jeunes de l’an 2000 ? Quels chemins nouveaux pour proposer la foi aux jeunes ? » La troisième, à Nantes en 2004, avait pour thème : « Avec des jeunes qui s’engagent ». L’édition 2010 a été pour la première fois ouverte également aux acteurs de la pastorale des vocations. En arrière-fond, la réunion des deux services (l’évangélisation des jeunes et les vocations) en un seul – le Service pour l’évangélisation des jeunes et pour les vocations (SNEJV). Par ce signe fort, cette réalité catéchétique et pastorale est rendue manifeste : les vocations et l’évangélisation ne sont pas séparables !

Je mettrai ici l’accent plutôt sur les apports sociologiques proposés au cours de ces Assises et en particulier sur quelques-uns des points signalés par les intervenants, points qui devraient informer sérieusement nos pratiques. À partir de données quantifiables ont été pointés le nouveau rapport à l’autorité des jeunes, la place des pairs, ce que recouvre l’individualisme, le rapport aux nouvelles technologies et le champ d’expertise que les jeunes attribuent à l’Église : le spirituel. Ce dernier point, articulé à la question de l’autorité, est quelque peu dérangeant pour les acteurs de la pastorale que nous sommes. Certains pourraient y voir la relégation de l’Église par le corps social dans ce champ particulier. Pour mémoire, cette approche, que certains politiques actuels perpétuent, loin d’être nouvelle, est à l’œuvre depuis des siècles en France, spirituel rimant souvent avec paix sociale. Donc sous cet angle, pas de nouveauté profonde. Reste à travailler la question plus complexe de l’autorité.

Loin de méconnaître tout ce qui est fait en faveur de l’insertion des jeunes et en particulier dans l’Église, les conditions qui sont faites à la jeunesse restent inquiétantes ! Cependant, si notre but commun est de semer l’Évangile, notre devoir est de tenir la justice pour toute la jeunesse ! Celle-ci est souvent source de profits et paradoxalement à la fois l’alibi et la laissée-pour-compte d’une société vieillissante. L’Évangile est une parole vivante ? Alors l’absence de perspectives de la majorité des jeunes doit être au cœur de nos engagements et de nos pastorales ! Les belles paroles ne suffisent pas, ne suffisent plus. Ils sont l’urgence ! Une grande partie de la jeunesse est en danger ; précarité, pauvreté, absence de perspectives sont son lot quotidien. Savons-nous cesser de les juger à l’aune de notre propre jeunesse et selon nos propres critères ? Allons-nous vers ceux qui nous dérangent ou seulement vers ceux qui nous ressemblent ? Savons-nous rester au deuxième plan, en accompagnateurs et non pas en promoteurs ? Acceptons-nous de cesser d’être ceux qui donnent, qui font, qui impulsent, qui ont les bonnes réponses ? Sommes-nous capables d’être simplement humains et adultes, à leurs côtés, sans masques ni utilisation abusive de nos statuts, fragiles et aimants, prêts à nous laisser découvrir et piller, le cœur et l’intelligence, par ces jeunes pleins d’appétits ? En somme les aimons-nous ?

Nous avons choisi d’ajouter aux travaux des Assises une enquête, réalisée par le journal La Croix à notre demande. Elle ne concerne que les jeunes pratiquants proches de l’Église. Seule l’association entre un tel quotidien et un service d’Église (le Service national pour l’évangélisation des jeunes et pour les vocations) pouvait engendrer une telle enquête, car ces groupes de jeunes représentent un nombre trop réduit et donc trop peu significatif pour être quantifiable au niveau national. Ces jeunes, citadins/internautes, qui sont dans les aumôneries et les différents mouvements d’Église, sont d’accès plus « facile » pour nous ; il est cependant important que nous n’imaginions pas qu’ils sont « les » jeunes ! En revanche, parmi eux se trouvent d’innombrables annonceurs d’Évangile. Et si, avec eux nous vivions pleinement la mission de l’Église ?