L’année Samuel


Guillaume Villatte
service diocésain des vocations de Pontoise

 

Aperçu général

L’année Samuel accueille des jeunes de 18 à 25 ans sur une période de six mois, de novembre à mai. Elle leur propose trois engagements : l’oraison quotidienne à partir de la Parole de Dieu, l’accompagnement spirituel chaque mois et la participation aux activités proposées (deux journées, trois week-ends et une retraite de cinq jours en silence). Les rencontres permettent aux jeunes de vivre leur engagement soutenu les uns par les autres et de recevoir une formation adaptée. Chaque activité est le lieu d’une expérience spirituelle, tant par les partages (sur la prière et dans les temps de détente), les formations, la messe, que par l’école de la Parole. Très vite se noue un climat d’amitié caractérisé par une fraternité spirituelle.

Les participants sont éveillés à une attitude d’écoute intérieure en fondant leur vie sur la Parole de Dieu, source d’unification (« Écoute Israël »). Ils apprennent à discerner la voix du Seigneur et à Lui répondre. La Parole de Dieu est expérimentée comme une parole qui donne la vie, qui fait vivre, une parole qui s’adresse personnellement à chacun. Cette expérience, avec sa part éprouvante, permet aux jeunes de s’accueillir mutuellement et d’aller plus avant dans l’expérience de la communion ecclésiale. Les animateurs sont perçus comme des frères aînés vivant de la même expérience et pouvant en témoigner au nom de l’Église. L’expérience spirituelle se transforme chez certains en début d’expérience mystique.

Tant dans l’accompagnement spirituel que lors des rencontres et surtout lors de la retraite, les jeunes apprennent à mettre des mots sur les mouvements de leur âme ; ils apprennent à discerner et à se positionner suivant que « les motions viennent du bon esprit ou du mauvais esprit ». Ils trouvent joie et paix dans la compréhension de cette « météo » intérieure (consolations et désolations spirituelles) qu’ils apprennent à ne plus subir mais à vivre dans la fidélité au Seigneur. Une liberté intérieure s’élargit et leur permet de répondre aux aspirations profondes de leur cœur ; se réalise ainsi l’expérience de la conversion du cœur la et (re)découverte des repères anthropologiques de la Parole de Dieu.

L’animation de cette école de prière est confiée par le conseil épiscopal à un prêtre (c’est lui qui appelle les autres membres de l’équipe), une religieuse et un laïc ayant déjà vécus une expérience spirituelle, pouvant en témoigner avec recul et en dialogue avec d’autres spiritualités. Cette origine a permis de présenter l’année Samuel lors d’une journée du presbyterium en 2007. La diversité des vocations spécifiques, des âges et des expériences spirituelles permet aux samuélistes de trouver l’attitude de prière et de vie chrétienne qui est la leur. Se pose à eux de façon naturelle, la question des différentes vocations dans la suite du Christ et la vie en l’Église.

L’année Samuel est rattachée depuis son origine au service des vocations en raison de la mission et de l’orientation voulue par celui qui en fut l’initiateur. Avec la transmission de l’année Samuel à un autre responsable, lui aussi en charge du service des vocations deux choix ont été faits :
• L’année Samuel s’orientera davantage vers la vie d’oraison et le discernement des esprits. La Parole de Dieu reste centrale. Le but premier n’est plus l’éveil des vocations ; et pourtant les fruits sont là !
• L’année Samuel, bien que n’étant plus directement liée à l’éveil des vocations, restera attachée à ce service par choix de l’évêque, afin d’assurer une plus grande stabilité à son charisme. S’est posée la question de son rattachement au service de la vie spirituelle ou à celui de la pastorale des étudiants.

La nomination d’un troisième responsable, puis le changement de religieuse au sein de l’équipe d’animation, conduit à se réapproprier les intuitions de l’année Samuel, à les enraciner davantage dans la tradition ignacienne ainsi que dans la compréhension de la vie liturgique (la dimension mystagogique apparaît). Cette réappropriation est nécessaire afin de mieux présenter le charisme de cette école de prière au conseil épiscopal (qui en a fait la demande), aux mouvements et services concernés et à tel ou tel animateur pressenti.

 

Organisation pratique

La proposition se fait de bouche à oreille, lors des annonces aux grands rassemblements diocésains, dans les différents groupes. Un tract est diffusé par les paroisses et la pastorale des jeunes et sur le site diocésain.

Les rencontres ont lieu dans un endroit calme, beau et accueillant grâce à la présence d’une communauté religieuse attentionnée et discrète. Nous veillons aussi à prendre le temps nécessaire en se donnant des marges ; les jeunes ont besoin de souffler. Des chants ponctuent les différents moments de la journée, nous sommes attentifs à leur qualité. Certains enseignements se font à partir d’une icône, d’une pièce de musique afin d’ouvrir différentes portes à l’accueil de la Parole de Dieu. Chaque rencontre se termine par la célébration de l’eucharistie, l’oraison y trouve sa source, sa nourriture et son sommet.

Un entretien préalable permet de connaitre les jeunes, de vérifier leurs motivations et leur possibilité de tenir leur engagement ; il permet aussi aux jeunes d’entrer déjà dans l’attitude de prière de l’année Samuel. Éventuellement, il permet une autre orientation.

 

La journée de lancement

Elle a pour objectifs de :
• souder le groupe par un partage de leurs motivations et expériences de la Parole de Dieu, et la détente…
• expliquer plus profondément les trois engagements ;
• donner des repères pratiques sur l’oraison et sa mise en place dans une vie de jeune ;
• donner des pistes pour vivre un accompagnement spirituel ;
• décoder rapidement le style des péricopes de l’évangile (souvent apocalyptique en ce mois de novembre !) ;
• vivre un temps d’oraison sous forme « d’école de la Parole ». Et comme pour chaque activité : déjeuner et marche digestive…

 

Les trois week-ends

Le samedi après midi (16 h - 22 h 30)
• Temps de prière puis écoute mutuelle des expériences liées à la vie d’oraison et à l’accompagnement spirituel ; simplicité, respect mutuel et communion caractérisent cette écoute. À chaque fois une porte d’entrée est proposée. (Un passage les ayant marqués…) L’écoute se termine par de libres échanges entre eux, puis par la reprise d’un ou deux points par les animateurs.
• Enseignement sur l’évangile de 45 mn puis 15 mn pour les questions (Évangile et évangiles ou les grands repères de la vie du Seigneur ; l’évangile de l’année ; les récits de la Passion ou de la Résurrection selon le temps liturgique).
• Après dîner, accueil d’un témoin (un couple, une religieuse, un prêtre) qui exposera les diverses étapes de sa relation avec la Parole de Dieu.
• Prière des complies et expérience du silence jusqu’au petit déjeuner.
• Petit déjeuner suivi des laudes avec la communauté.

 

Le dimanche matin (8 h 30 - 12 h 30)
• Enseignement sur la vie d’oraison et/ou la vie liturgique : reprise et approfondissement de ce qu’est l’oraison, ce qui favorise l’oraison, différentes méthodes ; mystère de l’incarnation et mystère pascal. (45 mn + 15 mn).
• École de la Parole (une bonne heure) : invocation à l’Esprit Saint, psaume en deux chœurs, proclamation de l’Évangile et point d’oraison, après vingt minutes d’oraison la prière se poursuit sous forme de partage en petits groupes (10 mn), puis reprise de l’oraison silencieuse (10 mn), chant et réponses à quelques questions sur le passage biblique, la vie chrétienne et des repères de la foi.

 

Le dimanche après midi (12h30-17h00)
• Le repas suivi d’une bonne marche : détente, meilleure connaissance mutuelle, entraide.
• Relecture du week-end sur le fond et sur la forme.
• Préparation et célébration de la messe.
• Goûter et au revoir.

 

La retraite de cinq jours

Tous s’entendent pour dire qu’elle est le point « de passage » de l’année Samuel. Elle puise dans l’esprit des Exercices spirituels ignatiens : silence, entretiens, oraisons, accompagnement quotidien et discernement des esprits…

Chaque soir, écoute mutuelle sur la journée écoulée, invitation à cultiver certaines attitudes en vue de l’oraison (don de soi, humilité, modération, chasteté, repères d’équilibre de vie…), dialogue d’Alliance.

Nous participons aux offices monastiques sauf complies, le sacrement de réconciliation est proposé.

Le thème peut varier en fonction des jeunes : maturités, fragilités… Il s’agit toujours d’accueillir le don de la vie (principe et fondement) puis de suivre le Christ.

La dernière journée
• Relecture d’expérience, partage et action de grâce.
• Enseignement sur la vie dans l’Esprit Saint ou sur la vie trinitaire.
• École de la Parole
• Repas et détente.
• Comment continuer à vivre de la grâce de l’année Samuel ? Ouverture sur les propositions diocésaines…
• Célébration de la messe et goûter final.

 

Fruits, questions, perspectives

Voilà une douzaine d’années que l’année Samuel existe, soit plus de cent cinquante jeunes « samuélistes ».

Ils sont originaires de tous les horizons culturels et ecclésiaux de notre diocèse ; ils participent ainsi au tissage d’un réseau entre jeunes du diocèse par l’amitié fraternelle, l’attachement à l’Église diocésaine et l’expérience spirituelle qu’ils continuent, pour beaucoup, à vivre. Les bases qu’ils ont reçues leur permettent d’enrichir la vie des différents groupes, services ou mouvements d’Église auxquelles ils appartiennent.

Parmi les anciens nous retrouvons des séminaristes, des religieux et religieuses, des couples chrétiens et des jeunes en responsabilité diocésaines ou dans un mouvement d’Église. Ils se reconnaissent très vite comme « frères et sœurs » par la même expérience fondatrice. Ils se font naturellement les promoteurs de l’« année Samuel » auprès de leurs proches ; et souvent le désir de participer à cette école de prière a ainsi pu murir pendant deux à trois ans.

Le fait de se mettre à l’écoute de la Parole de Dieu – dans la fidélité et une certaine pauvreté – conduit les jeunes à faire l’expérience du mystère de l’Église et à réorienter leur vie sur des bases anthropologique solides. Il s’agit bien d’une « école d’humanité ».

La rencontre de l’Orient et de l’Occident à travers la participation chaque année d’au moins deux jeunes chrétiens d’origine chaldéenne ouvre des perspectives que nous ne cessons de découvrir.

Pour l’équipe d’animation, être témoin de la puissance de salut de la Parole de Dieu (Rm 1, 16) est source d’action de grâce et d’espérance. C’est un ressourcement et un apprentissage qui permet envisager autrement l’action pastorale : offrir les conditions pour que le Seigneur mène leur « barque ».

 

Questions en suspens

• Quel type d’enracinement ignacien poursuivre, quelles forma¬tions pour les animateurs, et lors de l’appel d’un nouvel animateur ? Créer un livret pédagogique ?
• Comment informer les accompagnateurs spirituels de ce qui est spécifique au cheminement d’un jeune de l’année Samuel ? • Approfondir les liens avec la communauté chaldéenne, afin de mieux accompagner les jeunes dans cette traversée de plusieurs cultures, liturgies et spiritualités, surtout après l’année Samuel.

 

Perspectives possibles

• Adapter l’année Samuel à des lycéens par le biais de propositions plus légères. Cela pourrait encourager à prendre les engagements de cette école de prière.
• Poursuivre la récente proposition pour les anciens : une journée, une retraite de trois jours… chaque année.
• La mise en place d’un site Internet ?

L’Esprit qui travaille l’Église en France a suscité le charisme de l’année Samuel. Il se situe en amont de l’éveil des vocations et resitue cet appel dans toute sa justesse. Cette expérience peut servir à éclairer le chemin dont nos évêques indiquent la direction dans les documents : Aller au cœur de la foi et Nouvelles orientations pour la catéchèse. L’année Samuel est une véritable démarche d’initiation ! Elle correspond bien à l’invitation faite par le synode des évêques sur la Parole de Dieu.