Vous ferez cela en mémoire de moi


Père André Grandjean
prêtre du diocèse de Créteil

A l’occasion de mes 50 ans de sacerdoce - un jubilé - en 1994, un jeune, très inspiré, m’interpelle : « Père, n’êtes-vous pas fatigué d’avoir célébré la messe tous les jours pendant 50 ans ? Car j’ai fait le calcul : vous avez donc dit 18 250 messes. » Et de lui répondre : « Et bien non ! Plus je la célèbre, plus je suis heureux. » C’est un des témoignages que je peux apporter maintenant.

Au cœur de ma vie

Dans ma vie spirituelle, l’Eucharistie est “présence” d’un Dieu invisible qui se rend visible à travers sa création (pain, vin, paroles…), dans la foi d’un Dieu qui est Amour.

Elle demeure une des nourritures essentielles de ma foi et de la vitalité de mon ministère, liée à la méditation de la parole qui trouve sa place dans le mystère de la messe.

Jusqu’en 1960, l’Eucharistie se célébrait dans un esprit d’adoration, tournée vers la Trinité, c’est-à-dire le prêtre seul à seul avec son Dieu, n’exigeant guère la coopération de l’assistance : dos tourné, latin, gestes… A partir de la réforme de la liturgie, l’assemblée participante, célébrante, et la face du prêtre tournée vers elle appelle sa “collaboration” : quelle joie pour moi de se sentir “partie prenante” avec les baptisés ! Ce fut une révélation, mais non une révolution. Joie de partager cette Eucharistie dans la “communion” qui nous unit, et à la Sainte Trinité, et à nos frères et sœurs rassemblés en Eglise, car là encore, depuis plus de 50 ans, l’Eglise, humaine et divine à la fois, est au centre de mon ministère d’apôtre et de témoin.

Comme au premier jour : me voici

A chaque période de changements dans l’Eglise, l’essentiel demeure, dans la mesure où nous restons fidèles à la parole donnée : “adsum  : me voici”. Parole redite avec le même enthousiasme qu’au jour du premier appel officiel et public de l’ordination, chargée cependant des joies et des épreuves de l’existence.

L’Eucharistie reste toujours jeune parce qu’elle s’inscrit dans le temps mais ne connaît pas le temps : elle est “présence de Celui qui est”. Et rappelons-nous que - où que nous soyons, quoi que nous fassions, dans la lumière comme dans les ténèbres - chacun et chacune demeure présent en toute Eucharistie : « Souviens-toi, Seigneur, de… »