Message du Saint-Père aux participants


Jean-Paul II

Rome, le 8 mai 1997

Bien chers participants au Congrès européen sur les vocations !

Je suis heureux de vous adresser mes salutations les meilleures au début de vos travaux sur ce thème important : "Nouvelles vocations pour une nouvelle Europe". Le Congrès a été l’objet d’une préparation soignée qui a mobilisé de nombreuses personnes qui se consacrent à la pastorale des vocations, et il constitue un grand signe d’espérance pour les Eglises du continent européen ; il apporte sa contribution providentielle à ce grand rassemblement d’expériences de foi qui rappellent à l’Europe ses racines chrétiennes et aux Eglises leur mission d’annoncer Jésus-Christ aux générations du troisième millénaire.
Cette initiative opportune veut attirer l’attention sur la pastorale vocationnelle, reconnaissant en elle un problème vital pour l’avenir de la foi chrétienne dans le continent et, par conséquent, pour le progrès spirituel des peuples européens. Il ne s’agit pas d’un aspect sectoriel ou marginal de l’expérience ecclésiale, mais bien du vécu lui-même de la foi en Jésus-Christ, unique projet capable de combler pleinement les aspirations les plus profondes du cœur humain.

Toute vie est obéissance à une vocation

La vie a une structure essentiellement vocationnelle. En effet, le projet qui la concerne plonge ses racines au cœur du mystère de Dieu : "En Lui - dans le Christ -, Dieu nous a choisis, avant que le monde fût créé, pour être saints et sans péchés devant sa face, grâce à son amour" (Ep. 1, 4).
Toute l’existence humaine est donc une réponse à Dieu qui fait sentir son amour, surtout lors de certains rendez-vous : l’appel à la vie ; l’entrée dans la communauté de grâce de son Eglise ; l’invitation à rendre témoignage au Christ dans la communauté ecclésiale selon un projet qui est tout-à-fait personnel et unique ; la convocation à la communion définitive avec Lui à l’heure de la mort.

Il ne fait donc aucun doute que l’engagement de la Communauté ecclésiale pour une pastorale vocationnelle est un des plus graves et des plus urgents. En effet, tout baptisé doit être aidé à découvrir l’appel qui, dans le projet de Dieu, lui est adressé, et à s’y rendre disponible. Il sera ainsi plus facile, pour celui qui est le destinataire d’une vocation particulière au service du Royaume, d’en reconnaître la valeur et de l’accepter avec générosité. Il ne s’agit pas en effet d’éduquer les personnes à faire quelque chose, mais bien à donner une orientation radicale à leur existence et à faire des choix qui décident pour toujours de leur avenir.

Dans cette perspective, ce Congrès sur les vocations au sacerdoce et à la vie consacrée en Europe constitue un acte de foi dans l’action efficace et constante de Dieu ; un acte d’espérance dans l’avenir de l’Eglise en Europe ; un geste d’amour envers le Peuple de Dieu du "vieux continent", qui a besoin de personnes totalement consacrées à l’annonce de l’Evangile et au service des frères. Vous voulez identifier les stratégies opportunes pour aider ceux que le Seigneur choisit pour cet engagement total à découvrir l’appel qui leur est adressé et à prononcer leur "oui" sans réserve.
Votre attention se tourne surtout vers les jeunes, afin qu’ils sachent accueillir l’invitation du Maître à le suivre. Il les fixe de son regard pénétrant dont parle l’Evangile de Marc (cf. Mc 10, 21) : un regard qui évoque le mystère de lumière et d’amour qui entoure et accompagne toute personne humaine dès le premier instant de son existence.

Les difficultés et les attentes d’aujourd’hui

Les difficultés qui rendent aujourd’hui difficile l’adhésion à la proposition du Christ sont bien connues. Parmi celles-ci : la société de consommation, une vision hédoniste de la vie, une culture de l’évasion, un subjectivisme exacerbé, la peur devant des engagements définitifs, un manque diffus de projets d’avenir.

Comme le jeune homme riche dont nous parle l’Evangile (cf. Mc 10, 22), de nombreux jeunes ressentent de fortes résistances intérieures et extérieures devant l’appel du Christ et, souvent, ils se retirent, tristes, cédant à des conditionnements qui les freinent. La tristesse qui enveloppe le visage du jeune homme riche est le risque récurrent de celui qui ne sait pas se décider à dire oui à l’appel, et la tristesse n’est que la façade de cette absence de valeurs qui est au plus profond du cœur et qui conduit souvent celui qui en est victime à emprunter des chemins d’aliénation, de violence et de nihilisme.

Cependant, le Congrès ne peut se borner à examiner les problématiques évidentes qui marquent le monde des jeunes. Il a surtout pour tâche de signaler aux Communautés chrétiennes les ressources, les attentes, les valeurs présentes chez les nouvelles générations, en présentant en même temps des suggestions concrètes pour l’élaboration, à partir de ces prémisses, d’un sérieux projet de vie inspiré par l’Evangile. Celui qui aime les jeunes ne peut pas les priver de cette nouvelle et exaltante possibilité de vie, à laquelle le Christ appelle la personne en vue d’une réalisation plus grande de ses potentialités, prémisse d’une joie intime et durable. Il faut donc faire tous nos efforts pour que les jeunes parviennent à mettre le Christ au centre de leur recherche et à suivre docilement son appel éventuel.

Votre Congrès peut trouver une grande lumière dans les paroles de l’Apôtre qui dessinent le statut théologique de toute Communauté ecclésiale : "Les dons de la grâce sont variés, mais c’est toujours le même Esprit. Les fonctions dans l’Eglise sont variées, mais c’est toujours le même Seigneur. Les activités sont variées, mais c’est toujours le même Dieu qui agit en tous" (1 Co 12, 4-6). C’est dans cette perspective que les Eglises particulières doivent s’efforcer de soutenir le développement des dons et des charismes que le Seigneur ne cesse de susciter dans son Peuple. Engendrer dans l’Esprit de nouvelles vocations est possible quand la Communauté chrétienne est vivante et fidèle à son Seigneur. Cette vitalité féconde présuppose un fort climat de foi, la prière capillaire et assidue, l’attention à la qualité de la vie spirituelle, le témoignage de communion et d’estime à l’égard des multiples dons de l’Esprit, la passion missionnaire pour le service du Royaume de Dieu.

Nous devons donc réaffirmer que la pastorale vocationnelle ne s’épuise pas dans des initiatives occasionnelles et extraordinaires qui se juxtaposent au cheminement normal de la communauté ecclésiale. Elle doit plutôt constituer une des préoccupations constantes de la pastorale de l’Eglise locale.
A cet égard, l’Année liturgique constitue une école permanente de foi, grâce à laquelle tout baptisé est invité à entrer dans le vif du mystère de Dieu pour se laisser façonner à son image et à sa ressemblance.

L’importance de l’éducation et de la pédagogie

On sait combien, de nos jours, est urgente l’attention pastorale portée à la médiation qu’est l’éducation. Au point qu’une Eglise particulière ne peut regarder son avenir avec confiance que si elle est capable de mettre en acte cette attention pédagogique, en veillant constamment à aider les formateurs et, en tout premier lieu, les prêtres.

Ce Congrès représente donc une invitation à tous ceux qui sont appelés - prêtres, consacrés et consacrées - à être des témoins joyeux dans le service du Royaume, qui savent bien que leur vie est une présence toujours importante aux côtés des jeunes : elle encourage ou décourage, suscite le désir de Dieu ou bien constitue un obstacle à le suivre. La première proposition vocationnelle est offerte par un témoignage cohérent du Christ ressuscité. En outre, le Congrès veut favoriser la croissance d’une authentique conscience éducative chez les formateurs eux-mêmes, appelés à une responsabilité lourde et exaltante aux côtés des jeunes : celle de les accompagner dans leur recherche, leur donnant la passion d’apporter une réponse vocationnelle généreuse, pour renouveler dans cet aujourd’hui de l’Eglise le miracle de la sainteté, vrai secret du renouveau ecclésial souhaité.
Bien chers frères et sœurs ! Vous avez devant vous une tâche qui, certes, n’est pas facile, mais la prière incessante qui accompagne cette rencontre des Eglises qui sont en Europe nourrit l’espérance dans la promesse de Dieu et dans les réponses radicales à son appel : elles sont possibles, aussi, de nos jours. La prière est le secret capable de garantir le renouveau de la confiance à l’intérieur de la Communauté chrétienne. La prière est le soutien constant de ceux qui sont appelés à servir la cause de l’Evangile et à promouvoir la pastorale des vocations en ces années difficiles mais qui ne manquent pas de signes clairs d’un nouveau printemps spirituel. La prophétie du radicalisme évangélique est un don : le Seigneur ne permettra pas qu’il fasse défaut à son Eglise au seuil du troisième millénaire.

Que Marie, modèle de toute vocation et exemple transparent d’une réponse sans réserve à l’appel de Dieu, vous accompagne dans votre engagement pastoral au service de "nouvelles vocations pour une nouvelle Europe".

Avec ces sentiments, je vous accorde à tous une spéciale Bénédictions apostolique.