A l’aube du XXIe siècle


"Il est très difficile de prophétiser, surtout quant il s’agit du futur."

(Proverbe chinois)

"Nous pouvons seulement créer le sens du futur à force de réfléchir sur le présent pour pouvoir, si possible, prévoir l’avenir."

(Pedro Arrupe, sj)

Introduction

Comme cadre d’introduction de mon intervention, je vous rappelle les quatre préoccupations les plus communes que ressentent aujourd’hui la plupart des Ordres et Congrégations en relation avec la pastorale juvénile des vocations (PJV) et la vie religieuse apostolique (VRA). Il va sans dire que ma source principale d’information est la situation espagnole, la seule que je connaisse. Je me considère satisfait si vous, représentants des autres pays d’Europe, ici présents, vous vous reconnaissiez avec votre problématique dans notre situation. La causerie se compose de trois parties : la voix de la sociologie (quatre données), la voix de la culture (quatre valeurs), et, finalement, la voix de la théologie (quatre témoignages).

I - La voix de la sociologie : quatre données de statistique

1 - Le manque de vocations

Voici quelques données officielles de la Confer espagnole (1993) :

282 Congrégations féminines ("Guide", 1993, 7e édit.)
814 novices (2, 8 par Congrégation)
141 Congrégations : aucune novice
90 Congrégations : aucune professe à vœux temporaires
(pas de "génération pont")
98 ordres de congrégation masculins ("Guide"1993, 8e édit.)
365 novices (3,7 par congrégation)
39 congrégations : aucun novice
24 congrégations : aucun profès à vœu temporaire (pas de "génération pont")

2 - La disproportion entre l’investissement en moyens pastoraux et les résultats obtenus en nombre de vocations
Comme donnée très significative sur ce point, l’existence du Secrétariat des Vocations de la Confer (SVC) est largement suffisante avec son activité déployée, à partir de Vatican II jusqu’à ce congrès, comme forum de rencontre et d’échange d’expériences pastorales et comme organisme créatif, coordinateur et donnant de l’élan à la PJV dans le secteur de la vie religieuse apostolique. Je pense que, avec des caractéristiques propres, la même chose se passe dans les autres pays européens. Si c’était le cas, nous pourrions tous nous reconnaître dans le diagnostic fait par notre Père général parlant aux jésuites du manque de vocations :

"De nombreux rapports qui parviennent à Rome parlent des problèmes qui touchent les jeunes des cultures occidentales de notre temps : problèmes de sécularisation, d’individualisme, d’un manque de constance dans les engagements, etc. Peut-être pour cela devrions-nous envisager le problème des vocations à partir de la perspective culturelle, comme quelque chose qui touche toutes les personnes et pas seulement les possibles candidats à la vie religieuse. Peut-être devrions-nous analyser le problème de la vocation dans un contexte beaucoup plus large dans les programmes pastoraux, et en exhortant tous les jésuites à représenter un rôle plus actif dans l’action pour les vocations."

De fait, à partir de la perspective culturelle, la structure et la mise au point de PJV qu’utilisent parmi nous la plupart des Congrégations, se montrent de plus en plus insuffisantes (et pourtant si nécessaires !). Il est urgent d’augmenter chez la plupart des religieux la conscience de coresponsabilité dans la tâche de promouvoir les vocations, surtout par la prière. C’est-à-dire, les aider à dépasser la mentalité qui tend à faire penser que la promotion des vocations est la mission de quelques "délégués" et non pas la responsabilité de tous ; évidemment, selon la mesure et les possibilités de chacun.

3 - Les "compétiteurs" de la VRA (Vie religieuse apostolique)

Fondamentalement, ceux-ci se concrétisent en deux alternatives : celles des mouvements laïcs dans l’Eglise de communion (pas mal d’entre eux avec des caractéristiques similaires à celles de la VRA) et celle du volontariat, sous toutes ses formes :

"Tandis que diminuent les vocations (à la vie religieuse et sacerdotale), augmentent vertigineusement le nombre de laïcs qui veulent aider les pauvres et faire ce qu’à une autre époque firent les religieux les plus dévoués, mais sans se consacrer pour toute une vie. Ce sont les "nouveaux moines", une espèce d’aspirant à être saint qui, parfois, ne veut rien savoir de Dieu, ni de l’Eglise. Donner une réponse à ces inquiétudes et faire une offre claire qui permette à ceux qui le désirent de grandir dans la foi en même temps qu’ils déploient leur générosité, est une question vitale pour le futur." (Santiago, Martin ABC, 12 février 1994).

4 - Le faible indice de persévérance dans la VRA

Je ne connais pas les statistiques officielles sur ce point. Je peux seulement vous offrir celles de mon propre Ordre en Espagne que j’ai étudiées spécialement :

485 vocations (du 1er janvier 1970 au 1er janvier 1971)
286 persévèrent (52 %)
229 sorties (47 %)

Je remarque que la moyenne d’âge du groupe dépasse légèrement les 20 ans. Et que la période de discernement de la vocation spécifique de chaque candidat a duré, comme minimum, un an.
J’aimerais sortir de ce congrès en ayant éclairé ce point. C’est-à-dire savoir si l’indice de persévérance des vocations dans la Compagnie de Jésus coïncide avec celui de vos congrégations respectives. Si cela était, le faible indice de persévérance des vocations poserait à la VRA deux grandes interrogations : l’une en relation avec le sujet culturel de la vocation (promotion des vocations), l’autre en relation avec son incorporation au corps religieux (formation religieuse).

II - La voix de la culture : quatre valeurs répercussions dans la VRA et la PJV

Dans ce contexte, quelles injections culturelles - quelles valeurs - faudrait-il introduire ou rendre plus puissantes, dans la PJV en vue de l’an 2000 pour essayer d’en faire une servante plus efficace dans l’encouragement des vocations à la VRA du futur ?
Dans la IXe assemblée générale de l’Office International de l’Enseignement Catholique (OIEC) célébrée à Bangkok (1982) sur le thème : " L’éducation aux valeurs pour les sociétés de l’an 2000", on pensa, et le temps a confirmé chaque jour davantage l’exactitude de cette intuition, à l’attention à quatre valeurs : le respect de l’autre, la créativité, la solidarité responsable, l’intériorité (Lumen Vitae, 1982, n°2, pp.173 ss.).
Ces quatre valeurs sont interactives. Chacune alimente les autres. Pour cela on peut mettre l’accent sur n’importe laquelle, en ne perdant pas de vue les autres. Quant à mon exposé personnel que je vous propose, il implique une mise au point et un style évangélisateur qui touchent la façon de comprendre la PJV et la conception de la VRA du futur.

1 - La solidarité responsable

Nous entrons dans le XXIe siècle avec des déséquilibres quelque peu dangereux, non seulement de type nucléaire mais économique et social, d’une part, et écologique, d’autre part. La Solidarité responsable, c’est-à-dire celle qui "répond" à ces déséquilibres, se convertit en une valeur culturelle clé pour le siècle à venir. Ainsi l’affirment dans tous les domaines les analystes les plus éveillés et, de manière très significative, Jean Paul II dans ses grandes Encycliques.

Devant ce tournant de siècle (A. Bolado sj "Tournant de siècle et solidarité" (Sal Terrae, 1993) l’humanité se trouve devant une opportunité qu’elle ne peut laisser passer, sous peine de courir un grave danger, puisque le modèle économique du capitalisme (principal responsable des déséquilibres et détériorations du troisième et du quatrième mondes) ne peut être rendu universel pour tous les hommes (les ressources de la planète sont limitées) ni ne peut être soutenu à moyen et long terme pour le premier monde. Si on ne corrige pas le plus tôt possible cette tendance, la situation du premier monde fera augmenter criminellement la famine du reste de l’humanité. Une conversion de toute la société est donc urgente, une conversion à la solidarité interdépendante qui rende possible un NOUVEL ORDRE économico-politico-écologique ("Justice et Paix pour toute la création", document final de l’Assemblée Oecuménique de l’Europe, Bâle 1989).

Un des signes remplis le plus d’espérance de la présence dans la société civile de la sensibilité solidaire sont les Organisations non gouvernementales pour le Développement (ONG), dont une bonne partie est de nature confessionnelle chrétienne. En plus, un bon nombre d’entre elles s’alimentent comme nous l’avons déjà indiqué, du volontariat croyant et, même, semblent être une alternative aux vocations religieuses d’antan.

Il devient donc indispensable de promouvoir dans la PJV la solidarité responsable comme une disposition habituelle du cœur et faire d’elle une vertu publique, si nous voulons mettre nos jeunes en syntonie avec la meilleure sensibilité du moment. Mais, comme croyants, nous devons mettre tout l’intérêt pour l’éclairer et la vivre à partir de racines sacrées : celles où nous nous sentons comme fils et frères, et donc comme fraternels et solidaires.

Pour cela, la PJV d’abord et la VRA ensuite, doivent aider le jeune à parcourir le chemin qui va du sentiment de s’associer à la douleur humaine (avoir intériorisé la douleur du frère) à la compassion divine (avoir découvert, par la grâce, que la douleur du frère est la souffrance du Fils de Dieu). Parce que seulement à partir de cette expérience jaillit la vocation prophétique qui a toujours placé le chrétien là où se trouve l’humanité marginale et souffrante, comme le confirme unanimement la vie et le témoignage de tous nos fondateurs. La dimension politique de nos fondateurs, c’est-à-dire de leurs actions humanitaires au service des derniers a toujours été une conséquence existentielle de leur expérience mystique : "ce que vous avez fait à un de ceux-ci, vous me l’avez fait à moi".

Seulement l’expérience de cette solidarité/compassion peut surpasser en nous la grande tentation qui nous menace tous à notre époque, l’apathie. Attitude qui nous fait méconnaître la souffrance d’autrui, même si ce ne peut être que par ignorance coupable, qui nous vide de compassion et nous rend incapables de nous associer à la douleur humaine.

Répercussions dans la VRA et dans la PJV

Quelle répercussion la valeur solidarité/compassion a-t-elle sur la PJV et la VRA ? La principale conséquence, d’où partent les autres, c’est leur mutuelle interaction. D’une part la PJV doit être au service de la VRA du futur. Et, en même temps, celle-ci doit offrir aux nouvelles vocations des voies appropriées pour leur réalisation. Pour cela, trois tâches semblent nécessaires et urgentes, deux propres à la VRA et la troisième indispensable à la PJV.

Première tâche  : Que chaque famille religieuse se re-trouve aujourd’hui avec le destinataire charismatique de ses origines. L’évolution et le développement de la société ont rendu celles-ci aptes pour donner une réponse aux besoins sociaux de l’éducation, de la santé et des services d’assistance, etc., qu’en d’autres temps l’Eglise, à travers la VRA, avait pris en charge de manière subsidiaire et charismatique. Ces congrégations ont besoin de rencontrer à nouveau aujourd’hui le destinataire charismatique d’hier, au risque de rester dans le vide.

"Le service que nous devons prêter à l’Eglise et à l’humanité contemporaine est un élément de grande valeur pour notre survie et une grande garantie. Ce qui est inutile n’a plus de raison d’être." (P. Arrupe sj. "Le futur de la vie religieuse" revue Confer, 1991).

Deuxième tâche : La primauté de la pédagogie de l’Incarnation dans la tâche pastorale qui prépare et dispose le candidat à être membre de la VRA du futur, en l’aidant à regarder "la face de la terre avec la grande diversité de personnes", à se laisser toucher par celle-ci, c’est-à-dire expérimenter la souffrance humaine qui amène à découvrir la compassion divine et, ainsi, se sentir mobilisé par la grâce incarnée qui le rend capable d’être solidaire/compatissant.

Troisième tâche : Alléger "l’excès instrumental" des actuelles institutions religieuses en fonction d’une VRA qui fasse voir avec plus de clarté la dimension mystique de leurs membres et la qualité humaine de leurs personnes et communautés. Une telle reconversion institutionnelle passe nécessairement par une planification apostolique qui réussisse à donner une nouvelle dimension au poids institutionnel et aux effectifs humains en fonction de priorités apostoliques déterminées. Pour réussir dans cette tâche il faut situer la génération pont dans des conditions qui lui permettent de créer des réalités institutionnelles actualisées selon le propre charisme, et recréer et fortifier celles qui existent déjà, dans la mesure du possible. Dans ce sens, la fidélité créative, du charisme est un défi auquel aucune famille religieuse ne peut renoncer comme condition, qui n’est pas l’unique, de survie.

"Le charisme du fondateur est ce qui caractérise chaque institut ; il exprime la spécificité de notre service à l’Eglise et au monde. En lui nous avons la grâce particulière accordée au Fondateur et, par lui, à l’institut. Devant l’appliquer et la comparer aux circonstances modernes, il devient indispensable d’y réfléchir, d’approfondir sa compréhension, de découvrir en lui de nouvelles richesses qui, peut-être, sont demeurées inconnues et cachées jusqu’à maintenant. Nous ne pouvons pas trahir notre charisme de fondation mais nous devons mieux le comprendre de jour en jour et l’appliquer aux circonstances historiques concrètes." (P. Arrupe)

2 - L’intériorité

Que signifie intériorité ? C’est la capacité de vivre du dedans, de ne pas être vécu du dehors. C’est la capacité d’accueillir la propre vie et de la diriger vers un projet voulu par soi-même, non inoculé de façon hétéronome de l’extérieur. L’intériorité c’est ce qui nous permet de nous déconnecter des stimulations et sollicitations qui nous parviennent du dehors, de prendre conscience de soi-même - que veulent-ils faire de ma vie ? Qu’est-ce que je veux en faire ? - et de déployer de là les sentiments et l’intelligence. "Etre parfois philosophe et d’autres fois poète".
Comment se trouve cette valeur dans la culture ? Elle est à la fois présente et ambiguë. Ces dernières années il y a eu une forte déviation vers l’intériorité mais sous forme d’intérêt pour le moi intime et les "feelings", pour tout le psy, à la chasse des expériences de tout genre...
Dans la culture grandit ce que nous pourrions appeler intériorité non-transcendante symbolisée dans le film "Le cercle des poètes disparus". Film qui annonce l’explosion du moi, des sentiments, de l’imagination, de l’intériorité contre l’empire des normes. Mais on n’a pas tenu compte que ce film finit par un suicide. C’est-à-dire, quand le monde de l’intériorité explose sans devenir autotranscendant et discipliné, il n’amène nulle part. Il reste enfermé dans la contradiction. Et il ne reste que le suicide.
Grandit aussi ce qui, dans "Habitudes du cœur" (N. Bellah), est appelé l’individualisme expressif du groupe, comme contraire à l’individualisme utilitariste, fermé sur le moi. Il faut mettre l’individualisme expressif en relation avec la famille. Le "familialisme" figure parmi les premières sur la liste des valeurs avec les amis et le temps libre. C’est l’individualisme du petit groupe bourgeois, blindé contre la souffrance des autres et duquel on attend le maximum de compensation humaine pour continuer à vivre.
L’intériorité non-transcendante et l’individualisme expressif enferment leur part de promesse parce qu’ils peuvent permettre un plus grand contact de l’homme et de la femme avec eux-mêmes et une ouverture de groupe solidaire et coresponsable vers l’extérieur. Pour cela, leur ambiguïté est en relation directe avec leur capacité de transcender ou non la réalité du sujet, ou groupe où elle se produit.. C’est-à-dire passer ou non de l’individualisme expressif (fermé sur la famille/groupe) à l’individualisme engagé (ouvert à la société).
L’absence notable d’une intériorité authentique (intériorité transcendante) est en train de provoquer la déroute de la pensée (A. Finkelkraut), l’obstruction de l’esprit (D. Bloom), la culture de la satisfaction (John K. Galbraith)
A nouveau surgit la question. Si notre culture souffre d’un déficit d’intériorité authentique et productive, si avec cette absence la culture se vide de cœur même si elle est pleine de connaissances, si avec une intériorité comme celle qui est à la mode (non-transcendante) les problèmes "des autres" restent sans solution, que pourrait faire la VRA et sa PJV pour présenter une intériorité vraiment transcendante (ouverte à Dieu et aux autres) comme celle de Jésus ?
La réponse est claire pour J.-B. Metz : donner un témoignage voyant de la "Passion de Dieu" (Herder 1992) ou, en langage ignatien "en étant fous pour le Christ qui fut considéré comme tel" (Es. 167)
Selon J.-B. Metz pendant l’époque post-conciliaire la fonction des "Ordres religieux" (Herder, 1978) consista à être un énergique élan ("shock") et une radicalité vécue avec plasticité ("modèles productifs") de la manière de suivre le Christ, à laquelle sont appelés sans distinction tous les chrétiens. La crise des ordres était primairement une "crise de fonction" et seulement secondairement une crise de croissance.
Aujourd’hui, s’il est vrai que nous vivons dans un climat culturel qui cultive même un "athéisme obséquieux avec la religion" et qui conçoit celle-ci comme "compensatrice de mythes pour le temps libre", il est urgent de traiter plus que jamais le problème de la vie religieuse en lui-même, c’est-à-dire du thème fondamental du christianisme : la Passion de Dieu. Dans ce contexte culturel post-moderne le rôle des ordres n’est plus seulement d’exercer une fonction dans l’Eglise, d’être stimulant pour suivre le Christ, mais de lui faire voir, de façon publique, "la dangereuse mise en scène de l’histoire universelle, parce que Dieu lui-même s’y voit impliqué, et les ordres agissent (comme les doublures dans les films) où et quand le risque est essentiellement élevé". Parce que "précisément c’est la situation des communautés religieuses qui permet de voir à la lumière particulièrement diaphane l’état dans lequel se trouve le christianisme".

"Un christianisme qui ne se limite pas à survivre à lui-même, qui ne passe pas de mode, qui a besoin d’hommes "fous dans la mesure du possible", selon la possibilité de Dieu en ce monde... Un christianisme qui n’a pas complètement fait histoire - ni donc laissé derrière lui - sa situation basique ni son élan de fondation, a toujours besoin d’hommes et de femmes qui essaient de prendre au pied de la lettre quelque chose de la Parole de Dieu et refusent, par conséquent, d’amortir leur capacité de scandale en ayant recours, par exemple, à des herméneutiques purement psychologiques dans leur acharnement de normalité.
En son centre, le christianisme agit d’une façon très exagérée qui, contemplée dans une perspective purement psychologique, peut même acquérir des traits démentiels. Les niveaux d’attention, de dédication, de responsabilité énoncés par Jésus sont inquiétants, "scandaleux". Un souffle d’anarchie flotte sur son message. Qui peut le vivre en toute conséquence ? Et, ainsi, nous nous efforçons, depuis 2000 ans, pour le rapetisser, pour le réduire, pour pouvoir nous mettre en accord avec lui sans trop avoir à nous convertir. Et, cependant, encore une fois surgissent dans le christianisme l’inquiétude, la rébellion contre ces tentatives de rabaisser capricieusement ces niveaux ou de les représenter à travers un radicalisme simplement esthétique. L’histoire des ordres religieux est, à mon avis, en son centre, l’histoire de cette rébellion chezle chrétien : la tension entre suivre le Christ et le monde, entre mystique et politique, est enracinée au centre même du christianisme. Cette tension distingue et caractérise la grandeur et aussi en même temps la situation de menace et de risque constitutif du christianisme, elle caractérise son inquiétude apocalyptique. Ce malaise forme partie, à mon avis, de l’esprit et de la mission des ordres, aujourd’hui aussi (et précisément) aujourd’hui !"

("Passion de Dieu" pp. 15-16)

Répercussions dans la VRA et dans la PJV

Quels défis s’ensuivent pour la vie religieuse, si les suppositions exposées sont réelles ?
La tâche primordiale est de récupérer la mystique, ou passion pour Dieu chez le plus grand nombre de religieux et de communautés. "Le chrétien du futur ou il est mystique ou alors il ne sera pas chrétien" (K. Rahner sj). Mais il s’agit de la récupération d’une mystique christologique qui pousse la VRA à se situer, attirée par son Seigneur, là où Il se trouve : dans le désert, à la périphérie et à la frontière des exclus. Et le faire de manière plus exagérée et contre la culture, c’est-à-dire inexplicable pour la culture moderne et post-moderne. Peut-être, le futur de nombreuses congrégations dépend, en grande partie, de la capacité qu’elles ont de réaliser cette double mission. Les meilleures réussites de la rénovation post-conciliaire de la VRA et des nouvelles formes de vie consacrée que l’Esprit suscite aujourd’hui dans l’Eglise ne vont-elles pas dans ce sens ?

"La vie religieuse est en crise, mais pas seulement de vocations, mais de Vocation. Si un religieux ne parle pas de Dieu, ne transmet pas son enthousiasme pour Dieu, pourquoi est-il religieux ? Je crains que nous ayons fait un christianisme de philanthropes, d’humanistes , de bons agnostiques, et que ceci s’est infiltré aussi dans les couvents. Peut-être est-ce pour cela qu’il y a peu de vocations. Et la solution peut se trouver seulement en retournant aux sources, en redevenant ce que furent les fondateurs, qui avant d’être des maîtres, des prédicateurs ou des infirmiers, étaient des hommes de Dieu. Ils étaient le cœur fort et enthousiaste de l’Eglise."
(Santiago Martin "Le cœur fatigué" ABC, 11 déc. 1993)

Quelles tâches la culture de l’intériorité présente-t-elle à la PJV ? Les trois qui constituent son essence même et pour lesquelles la PJV lutte constamment dans notre contexte moderne et post-moderne : disposer le jeune à créer en lui les conditions qui lui permettent d’écouter et d’accueillir l’annonce explicite de Jésus-Christ de façon à ce qu’il se produise chez le jeune l’expérience personnalisée de la foi pascale (sans une foi vivante il ne peut y avoir vocation religieuse ! ) ; l’initier et l’éduquer à la prière sous toutes ses formes ; discerner la vocation à suivre Jésus sans conditions, quelle que soit la modalité concrète pour sa réalisation.

3 - Le respect de l’autre

"Personne" ici est tout être humain dans sa singularité unique et impossible à reproduire et que, contemplé à la lumière de la foi, on découvre comme fils et frère. Et "respect", se rapporte à l’attitude intérieure de reconnaissance et d’accueil de tout être humain et, par extension, de toute nationalité, race, culture, religion, sexe, différence sociale, etc.
Donc, selon ce que montre la sociologie de la connaissance, il ne suffit pas de renforcer le monde intérieur de la personne (dans notre cas en lui apportant une solidarité responsable et une expérience mystique) pour qu’elle maintienne ses convictions et ses lignes de conduite. Celles-ci sans structures d’appui ne perdurent pas. La personne grandit toujours dans une structure sociale où d’autres personnes partagent ses mêmes convictions et valeurs. Parce que celles-ci sont convaincantes, dynamisantes et qu’elles développent les personnes, elles sont génératrices de vie pour les autres, etc.
Mais la culture moderne tend à l’individualisme non-solidaire et qui exclut. C’est-à-dire tend à ne pas reconnaître et accueillir ce qui est différent. Par conséquent, si la réalité aussi bien sociale que psychologique, fait pression dans la direction de la peur que produit ce qui est différent et de la tentation de ne pas "le respecter" (le reconnaître et l’accueillir) , que pourrait faire la VRA et sa PJV pour propager une culture évangélique qui rayonne vers l’autre ? Selon le propos de Paul : "Parmi vous, il n’y a plus ni juif ni grec (différence de nation), il n’y a ni esclave ni homme libre (différence sociale), il n’y a ni homme ni femme (différence de sexe)" (Ga. 3-28).

Répercussions dans la VRA et dans la PJV

L’exigence principale que le respect de la personne réclame à la VRA dans une culture où s’exhibe l’individualisme expressif, est l’urgence d’accélérer encore plus, si c’est possible, le processus de transformation où se trouvent plongés la plupart des Ordres et Congrégations religieux, en fonction de la revitalisation humaine et spirituelle des personnes et des communautés. Pour cela il semble nécessaire et urgent de restructurer les Institutions religieuses en fonction d’une VRA qui soit davantage un signe narrateur du Royaume ("être" Royaume) qu’un instrument efficace du Royaume ("faire" Royaume).

"La catégorie "d’efficacité" consiste à concevoir la VRA et la faire fonctionner comme un instrument de transformation sociale. Cette conception nous a conduit au vertige de l’activité instrumentale qui angoisse les religieux des façons les plus subtiles. Comme si sur la VRA devait retomber tout le travail que les autres ne font pas."
"L’arme de transformation qu’emploie la VRA est une humble proposition de vie et d’action, qui entraîne certaines exagérations prophétiques jusqu’à parvenir même à des situations extrêmes. Dans toute forme authentique de VRA le peuple de Dieu et la société doivent découvrir des éléments de choc, de contraste, qui les fassent au moins penser. Sans exagération prophétique, la VR est comme le sel qui ne sale pas."
(Garcia Paredes, cmf)

La VRA sera symbolique et, par conséquent prophétique et contre-culturelle avec la valeur "respect" des personnes, dans la mesure où, en son sein et à travers son action, des personnes et des communautés apparaissent profondément réconciliées avec elles-mêmes et avec les autres, en communication et en harmonie dans n’importe quel genre de pluralisme, ouvertes à l’extérieur, en proximité, dialogue et collaboration avec tous les hommes de bonne volonté.
Quant à la PJV la tâche primordiale que lui demande le respect des personnes consiste à collaborer pour créer le sujet culturel de la VRA. Cette tâche inclut aujourd’hui un processus d’accompagnement plus long qu’en des époques antérieures, parce qu’il faut s’occuper simultanément de trois tâches basiques, toutes plus complexes et plus mystérieuses qu’en d’autres temps : le faire sujet de la vocation (= personne ayant de la consistance), l’éduquer dans la foi (= le faire croyant), discerner la vocation personnelle (= le situer dans l’Eglise).

4 - La créativité

Mais quelle créativité ? Parce que l’hyper-organisation, l’uniformité et l’anonymat menacent la singularité de chaque personne humaine et sa capacité d’expression, son originalité. La production technocratisée, la bureaucratie des institutions et le phénomène de l’urbanisation, sont trois des facteurs de la modernité qui mettent en danger la créativité personnelle, avec le continuel bombardement d’une société de consommation de plus en plus complexe mais toujours préfabriquée.
Ce n’est pas n’importe quelle créativité qui sauvera le XXIe siècle. Une créativité folle, dans l’anonymat ne le sauvera pas ni celle qui est mise seulement au service de l’individualisme expressif. Seulement celle qui permet de développer :

La communication entre des personnes en attitude de recherche conjointe pour trouver de nouvelles solutions à des situations nouvelles ; attitude qui exige liberté, climat de confiance mutuelle, de tolérance, de gratuité (opposé à l’excès d’efficacité), de dialogue et de communion. Parce que seulement ainsi se développe l’activité créatrice. Plus grande est la communication, plus grande est la créativité.

Le fait de vivre à l’"état de projet", c’est-à-dire en recherche permanente, sans être angoissé en répétant continuellement le "cercle idéologique". Cette attitude est sclérosante. En réalité, il s’agit de voir si notre foi doit faire quelque chose pour que nous soyions créatifs ou si, en confessant en parole le Seigneur, nous ne Lui accordons, dans la pratique, aucun pouvoir pour nous atteindre et nous émouvoir. K. Rahner appelait ce genre de croyants, "chrétiens réprimés" ou "athées pratiques".

L’ascétique du présent. Essayer de laisser le Seigneur nous rencontrer dans les circonstances concrètes de chaque jour. La vie ordinaire, sacrement de la rencontre avec Dieu ! sans regretter le passé ni fuir vers un futur qui n’existe pas.
Cette valeur de la créativité a aussi ses racines sacrées que nous devons faire resurgir à partir de la foi : Dieu donne la vie comme don ouvert, comme imagination créatrice, comme tâche inachevée. Nous vivons du "reparo escatologico", du jamais fini, consommé, jusqu’à ce que le Christ soit tout en tous. Devant Dieu nous sommes, tous et chacun, des "sujets" que personne ne peut manipuler, tous et chacun, nous sommes également nécessaires dans la construction du Royaume.

Répercussions dans la VRA et dans la PJV

Quelles tâches la créativité décrite réclame-t-elle à la VR ?

La première et principale : recréer le futur de la propre VRA, en l’adaptant aux "signes des temps". Tâche qui ne se réalise pas encore suffisamment, selon des théologiens et analystes autorisés de la VR. Parce que

"Les changements structuraux, législatifs et doctrinaux n’ont pas atteint, en fait, les buts espérés. Ils n’ont pas eu dans la vie réelle des religieux l’influence positive voulue, en les aidant à changer leurs attitudes profondes dans un processus de véritable conversion évangélique."
"Comment passer de la rénovation-adaptation "officielle" et de prédominance structurelle et documentaire, à l’authentique rénovation-adaptation et à la véritable transformation des personnes et de la VR ? Comment assimiler dans la vie les contenus formulés antérieurement ? Finalement, comment passer de la lettre à l’esprit et des textes à la vie ?"
(Severino M. Alonso cmf, La Vida Religiosa, Vaticano II, 25 anos, Ecclesia, 8 déc.1990).

La formation basique et la formation permanente doivent beaucoup compter à l’heure d’aborder cette "matière ratée".

La deuxième tâche est une condition nécessaire pour réussir la première : le discernement apostolique en commun ou la nécessité de compter sur tous les membres du Corps religieux, spécialement avec la"génération pont", pour mettre en marche le maximum de créativité quant à l’actualisation charismatique de la VRA spécifique. Dans ce sens il est extrêmement important que les institutions religieuses ne gênent pas la liberté institutionnelle des jeunes religieux pour leur permettre de réaliser leur vocation religieuse avec la nouveauté que l’Esprit veut susciter en eux.

La troisième tâche que la valeur créativité demande à la VRA va dans la ligne du dialogue et de la collaboration apostolique avec les autres institutions religieuses - quelqu’un a qualifié la collaboration entre les Congrégations, dans des projets apostoliques, de "re-catholisation" de la VRA post-conciliaire (G. de Cardedal) -, et de la collaboration avec les laïcs à partir d’une même spiritualité de partage.
Deux importants théologiens actuels de la VR voient la collaboration avec les laïcs comme un des signes "d’exagération prophétique" que la VRA est appelée à vivre aujourd’hui.

"En ce moment présent des Eglises particulières, il est absolument nécessaire d’établir une "mutuelle relation" avec les laïcs dans la vie et dans la mission. Nos "exagérations prophétiques" ont caractérisé le religieux. Exagération prophétique serait, en ce moment, de dire avec le Précurseur : ’"Il convient qu’ils grandissent et que nous mourrions". En ceci consiste l’amour exagéré : "Donner la vie pour les autres". Mettons-nous, sans conditions et sans intérêts, au service de nos frères, au service de la vocation chrétienne. L’Esprit, sans doute, fera refleurir la vie de ces instituts qui surent "vivre-pour-les-autres" et être les "libérateurs de leurs frères"."
("Severino M. Alonso cmf et J.R.C. Garcia Paredes cmf dans "Présence et Mission" Ed.PCL 1994).

Quant à ce qui touche à la créativité dans la PJV, elle a été très grande dans les vingt dernières années. Comme exemple significatif, j’ai fait allusion plus haut au sens du SDV dans ce domaine. Donc, être créatifs dans la PJV consistera encore à mieux appliquer, et davantage dans l’actualité, la pastorale que l’on faisait jusqu’à maintenant.

Une autre dimension que la PJV devra accentuer davantage dans le futur immédiat, au lieu de mettre l’accent sur les contenus doctrinaux ou l’application de moyens méthodologiques, sera de forger les vocations dans une attitude plus profondément ecclésiale et, donc, plus universelle et gratuite, plus détachée des préoccupations des congrégations... Dans la PJV du futur, la promotion des vocations pour l’Eglise devra passer au premier plan. Et de là, recevoir avec une joie reconnaissante les vocations que le Seigneur voudra bien appeler à sa propre congrégation. A partir de cette perspective, où nous trouvons-nous, au "crépuscule" ou à "l’aurore" des vocations ? Parce que ce qui manque ce sont des vocations sous les formes traditionnelles de la VRA, plus que celles sous d’autres formes de vocation chrétienne. Ainsi s’exprimaient à la radio COPE (le 25 avril 1994) Pilar et Amparo, deux des religieuses revenues du Rwanda et récompensées par le prix "Principe de Asturias" : "Nous sommes en train de vieillir, disait Pilar, Il y a peu de vocations à la vie religieuse. Des vocations il y en a mais celles-ci vont dans une autre direction."

III - La voix de la théologie : quatre témoignages

1 - L’indéfectibilité de la VRA dans l’Eglise (K. Rahner sj)

"Nous pouvons affirmer en toute assurance qu’il devra toujours exister dans l’Eglise une institution de vie chrétienne avec un certain degré de radicalité. Ainsi, dans ce sens, la Vie Religieuse existera toujours dans l’Eglise."
(Karl Rahner "Geist und Leben", nov. 1976)

2 - La survie des formes actuelles de VR (J.-B. Metz).

"J’ai ressenti à plusieurs reprises l’impression que certains ordres religieux, ou des communautés régionales déterminées dans les ordres, essaient d’imiter à leur propre niveau et chacun pour soi, cette invincibilité et pérennité qui ont été promises à l’Eglise seulement dans sa totalité. Mais quant à l’Esprit de Dieu dans l’Eglise il a été dit non seulement qu’Il souffle où il veut, mais aussi le temps qu’il veut. Les institutions religieuses créées dans l’Eglise par l’Esprit ne devraient-elles pas partir plutôt de l’idée qu’elles n’ont pas cette assistance pour toujours ? Ne devraient-elles pas inclure dans leurs calculs, précisément parce que leur origine vient de l’Esprit, qu’elles peuvent disparaître et mourir ?"

"Il s’agit de l’art de pouvoir cesser et mourir, non seulement au niveau de l’individu, mais d’une certaine façon, de la collectivité, comme fondation... Cet "ars moriendi" pourrait parvenir à créer une LIBERTE et une capacité de détermination qui, à son tour, se transformerait en TEMOIGNAGE charismatique dans l’Eglise et pour l’Eglise... Cet "ars moriendi" est la seule chose qui peut faire remarquer le VRAIMENT NOUVEAU, ce qui surmonte la crise quand elle arrive... Dans cet "ars moriendi" se reflète mieux la FIDELITE à la cause et à la mission originelles d’un mouvement charismatique qui, en définitive, peut seulement oser affronter l’inhabituel et "dangereux" parce qu’il était prêt d’avance à mourir."

"Les mouvements et institutions charismatiques doivent - dans un sens totalement positif - "se consumer", "s’épuiser". Quand ils n’admettent pas cette idée et s’obstinent, s’accrochent à leur mission supra-terrestre, il est facile qu’ils se "consument" et "s’épuisent", mais alors en sens négatif. La fidélité acquiert alors, souvent, des traits de nécrose. Elle s’enferme et se retranche derrière des formes de vie et des pratiques mortes, peut-être usées jusqu’à la mort par la force de l’Esprit. Un climat de mort se propage alors, où flotte l’angoisse, non l’espérance, et où finalement prospère seulement un désespoir laborieusement vidé de contenus et d’une haine inavouée."
(J.B. Metz, les Ordres Religieux, Herdern Barcelona, 1978, pp.23-25)

3 - La "vie consacrée" change de visage culturel
(José CristoRey Paredes, cmf)

"Dans l’ensemble de plus de 950 millions de catholiques, les religieux représentent seulement 0,12 %. Et de ce 0,12 % la plupart sont des femmes (78,41 %) et des laïcs (frères et sœurs 88,11 %) ; seulement 11,89 % des membres des instituts de vie consacrée sont des clercs".

"Ce groupe ecclésial, fondamentalement féminin et laïc, se trouve à un moment de transformation, de changement. Non seulement par sa sensibilité historique, par ses programmes de rénovation, mais aussi, parce que tout en vieillissant et décroissant dans les pays d’Europe, il rajeunit et croît dans les pays du tiers-monde, apportant une manière d’être pluri-culturelle, différente de l’européenne. La Vie Consacrée assume peu à peu - de plus en plus !- un visage latino-américain, africain, asiatique. Le passage d’un siècle à un autre restera marqué par la grande relève, avec des implications culturelles de proportions insoupçonnables. Les européens et les européennes seront une minorité dans une grande partie des instituts qui survivent. Le passage d’un christianisme catholique mono-culturel ou mono-centrique à un autre pluri-culturel et pluri-centrique se reflétera et, d’une certaine façon, s’essaiera dans les instituts de Vie Consacrée."
(J.C.Rey Garcia Paredes,cmf, "Habitants de la frontière" Religieuses et religieux face au Synode 94, revue Razon Y Fe, 1994)

4 - Moment d’épreuve ecclésiale (Crd. Carlos Maria Martini)

"Il est facile de constater que depuis toujours l’Eglise (et chacun d’entre nous)- réussit difficilement à se maintenir auprès de Jésus humilié, pauvre et crucifié, comme la femme de Job n’est pas capable de rester à côté de son mari pendant l’épreuve...
Nous pouvons voir un autre exemple dans la difficulté qu’a l’Eglise occidentale pour vivre aujourd’hui la pauvreté des vocations sacerdotales et religieuses. Spécialement les vocations féminines vivent aujourd’hui des moments très amers et douloureux à cause du vieillissement des membres de leurs communautés, à cause du manque de novices et comme conséquence dans l’incapacité de remplir leurs tâches. Nous nous demandons : à qui la faute ? Où est la faute ? Ce que nous devons faire c’est vivre cette épreuve dans la foi et la prière, une prière chargée d’amour et d’humilité, remplie de paix. Vouloir arracher à Dieu ce que nous voulons reste une grande erreur, en pensant que ceci nous est dû, ou que le Seigneur ne nous écoute pas parce qu’il est avare de ses dons. C’est une grande erreur de s’accuser les uns les autres, vouloir chercher le coupable d’une situation qui doit plutôt nous faire grandir en compréhension, aide et estime mutuelles, même dans l’Eglise. Nous devrions vivre la pauvreté des vocations sacerdotales et religieuses en restant auprès des épreuves de Jésus et en ne fuyant pas la difficulté en nous épanchant en amertumes, contrariétés et accusations."

(C.M. Martini, "Famille et vie laïque" PPC, 1993, pp.33-34).

Avelino Fernandez, sj